Mediator : un scandale d’Etat
Chaque citoyen devrait lire le rapport que vient de remettre l’IGAS au sujet de l’affaire du Mediator. Le délai de rédaction de ce rapport impitoyable, remis en quelques semaines, montre que tous les éléments en étaient déjà réunis et qu’il aura suffit de ces quelques semaines pour en établir la synthèse. Le tableau dressé est proprement effrayant. Il montre des autorité sanitaires, jusqu’au plus haut niveau, incapables de résister aux pressions commerciales, voire purement et simplement corruptrices, qu’une certaine industrie pharmaceutique est capable d’exercer. Les conflits d’intérêts semblent omniprésents, avec des experts émargeant aussi bien chez le juge ( la puissance publique) que chez les parties ( les fabricants de médicaments). Une “bureaucratie sanitaire” dénoncée comme telle par le rapport s’avère aussi lente qu’inefficace, et le principe de précaution, porté de nos jours à toutes les sauces, n’a jamais bénéficié dans ce scandale qu’au profit d’un médicament porté par un laboratoire qui a remplacé toute preuve scientifique par une stratégie de communication habile et complaisamment admise par des commissions au mieux abusées , au pire complices.
Tout ce scandale exige de revoir entièrement le système des AMM (autorisations de mise sur le marché), de réformer l’attribution du remboursement avec des comparateurs concurrentiels et non contre placebo, de revoir l’information médicale avec des grilles activité/prix des médicaments par classe thérapeutique, et de plus dissocier l’AMM de la reconnaissance d’un vrai service rendu par comparaison aux médicaments antérieurs.
Il exige de s’interroger au delà sur la dérive du corps médical français, qu’on a laissé s’installer dans le système des honoraires libres , générateur non seulement d’inégalités inacceptables en matière de soins et de santé, mais où les praticiens deviennent les otages non plus de patients , mais de clients exigeants de médicaments à la mode. En prônant de fait la “libéralisation”, dans les faits la privatisation rampante de la santé comme remède aux déficits, les gouvernements successifs depuis vingt ans ont découragé les médecins à participer à la santé publique, au lieu de les rémunérer correctement en échange d’un effort général de prescription rationnelle, de prévention et de dépistage.
L’affaire du Médiator est enfin emblématique d’un Etat à la dérive qui renonce à ses responsabilités face à la tyrannie des marchés et de la fusion d’une oligarchie publique et privée aux dépends de l’avenir et de la santé de la population dont il a la charge.
François MORVAN
Vice-président de Debout la République
Délégué national à la Santé
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