Dans sa chronique sur Radio Nova, Guillaume Duval revient sur le détricotage du paquet fiscal de 2007, qui se poursuit avec la fin du bouclier fiscal. Il ne reste plus en vigueur que la mesure la plus coûteuse et destructrice d'emploi : le subventionnement des heures supplémentaires.
La semaine dernière Nicolas Sarkozy a annoncé qu'il allait supprimer le bouclier fiscal sans pour autant supprimer l'Impôt de solidarité sur la fortune comme il l'avait prévu.
Oui. En octobre dernier, Nicolas Sarkozy avait indiqué qu'il voulait supprimer à la fois l'ISF et le bouclier fiscal. Le bouclier avait été mis en place par Dominique de Villepin en 2006. En 2007 avec le « paquet fiscal », Nicolas Sarkozy l'avait rendu encore plus généreux pour les très riches. Mais depuis, ce bouclier était devenu un véritable boulet pour la majorité : en 2010, les 1169 bénéficiaires les plus aisés qui possédaient chacun plus de 16 millions d'euros de patrimoines, avaient reçu en moyenne 362 126 euros du fisc… Il y avait de quoi attraper une attaque pour la plupart des Français, surtout en période de crise. A l'approche des présidentielles de 2012, il devenait urgent de mettre fin à un tel scandale.
Oui, mais Nicolas Sarkozy voulait supprimer en même temps l'Impôt de solidarité sur la fortune…
En effet, mais il y avait un hic : le bouclier fiscal a coûté 679 millions d'euros aux finances publiques l'an dernier, alors que l'ISF leur a rapporté plus de 4 milliards d'euros. Dans le contexte actuel, il fallait trouver d'autres recettes.
Mais personne n'a trouvé la solution miracle et l'ISF sera finalement maintenu…
Et c'est une bonne chose parce que l'ISF est un bon impôt : il est utile en effet de taxer non seulement les revenus du capital, comme voulait le faire Nicolas Sarkozy, mais aussi le stock de capital. C'est un moyen d'inciter ceux qui valorisent mal ce capital, et n'en tirent donc que de faibles revenus, à le céder pour que d'autres en fassent un meilleur usage. Malheureusement, les multiples exonérations - œuvres d'art, biens professionnels - qui vidaient largement l'ISF de sens ne seront pas supprimées. Les plus grandes fortunes du pays les Bernard Arnault, les Pinault et autres resteront donc largement épargnées par cet impôt.
Il s'agit quand même d'une nouvelle remise en cause du paquet fiscal
En effet. Après l'abandon de l'exonération très coûteuse sur les intérêts d'emprunts pour l'achat d'un logement, c'est un nouveau recul sur une mesure phare du paquet fiscal. L'abandon du bouclier fiscal devrait d'ailleurs s'accompagner d'un autre recul : les possibilités de donations sans droits de succession devraient être limitées et les droits de succession relevés sur les successions les plus importantes. Cela n'annule cependant pas encore complètement les dispositions du paquet fiscal en la matière qui étaient particulièrement iniques, favorisant une société d'héritiers et de rentiers.
Il ne reste plus grand-chose des mesures de 2007…
La réforme annoncée de l'ISF allège cependant beaucoup le poids de cet impôt sur les plus aisés sans que le barème de l'impôt sur le revenu ne devienne plus progressif et sans que les revenus du capital ne soient taxés de la même façon que les revenus du travail : ils bénéficient toujours d'un régime très favorable. De plus une des mesures les plus stupides du « paquet fiscal » reste encore en vigueur : l'Etat dépense toujours 4 milliards d'euros par an pour inciter les entreprises à faire faire des heures supplémentaires plutôt qu'à embaucher des jeunes ou des chômeurs. Les 181 millions d'heures sup subventionnées réalisées au quatrième trimestre 2010 représentent l'équivalent de 370 000 emplois à temps plein… C'est totalement absurde au moment où 4,6 millions de personnes, un actif sur six, sont inscrits à Pôle emploi.
Guillaume Duval