Pour les banques françaises, le discours officiel sur la crise financière est simple: elles sont solides et les Français le savent. Sauf que, durant le période 2007-2008 un mini vent de panique s'est emparé des déposants. Caché, ce phénomène n'a pas dérapé. Mais ce sont 30 milliards d'euros, 7,5% de l'encours qui ont fuit les banques.
N’ayez pas peur ». A la Fédération Bancaire Française (FBF), le message du petit fascicule intitulé « Parlons clair » est sans ambiguïté. « Les banques françaises sont solides : elles ont mieux résisté à la crise mondiale que les autres. » Lancée au début de l’année, la campagne de publicité visait notamment à contrer la « jacquerie » contre les établissements financiers lancée par Eric Cantonna. L’ex-star du foot, surfant sur le mécontentement des Français vis-à-vis d’un système financier considéré comme responsable de la crise, les invitait à passer au guichet pour vider leurs comptes.
Résultat ? Nul. Le bide de l’appel est inversement proportionnel à l’écho médiatique que l’affaire avait déclenché.
Pourtant le satisfecit des banquiers n’est que de façade. Eux le savent bien : après la déroute de la banque britannique Northern Rock, à l’automne 2007, un mini-vent de panique a soufflé de ce coté-ci de la Manche. Caché, nié le phénomène laisse pourtant des traces dans les statistiques de la Banque de France. Dès la fin de 2007, et jusqu’à ce que Nicolas Sarkozy ne s’engage un an plus tard à Toulon à ce qu'aucun déposant ne perde « un seul euro parce qu'un établissement financier se révélerait dans l'incapacité de faire face à ses engagements », un début de panique, un mini bank run, comme disent les anglo-saxons, est survenu en France. Ces retraits se sont en réalité poursuivis jusqu’en mars 2009, se stoppant avec la publication des bons résultats des banques. Entre ces deux dates, les Français ont retiré pour plus de 30 milliards d’euros, près de 7,5% de la totalité des sommes sur les comptes courants ! Du jamais vu….
L’argent n’a évidemment pas disparu. Et une partie des sommes a notamment été utilisé par les ménages pour conserver leur pouvoir d’achat grevé par la crise. Cette trace se distingue dans le creusement du déficit commercial accru de la France sur cette période.
Pour le reste, en fait l’essentiel de ces sommes, les Français ont choisi de les sécuriser. En témoigne la hausse sans précédent de la collecte sur le Livret A, produit historiquement garantie par l’Etat : 18,7 milliards d’euros en 2008.
Là aussi du jamais vu, puisque ce niveau est trois fois supérieur à l’ancien record.
Emmanuel Lévy - Marianne
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