Sous le titre apparemment protestataire, "Réforme du code électoral: à bas le rajeunissement !", paru sur Marianne2 en ligne, portant sur les conditions d'inéligibilité d'une certaine catégorie de citoyens, M. Timour Veyri et Maître Bluteau posent un cas qui ne pourrait appeler que protestations et, allons y puisque Stéphane Hessel a mis le mot à la mode, indignation.
"Désormais, les membres de cabinet des maires des communes de plus de 20 000 habitants, sont inéligibles (aux législatives), s'ils exercent leur fonction depuis moins d'un an à la date du scrutin. Philippe Bluteau, avocat à la Cour et Timour Veyri, enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris, et conseiller du maire d’Evreux, déplorent cette mesure qui empêcherait le renouvellement de l'Assemblée nationale, et son rajeunissement.(...)"
C'est sous le prisme haro contre le rajeunissement des assemblées que l'un des auteurs, 47 ans quand même, a choisi son plaidoyer pro domo. Il est strictement véridique que notre parlement n'est que têtes chenues, n'en déplaise à Olivier Dussopt (33 ans, benjamin de l'Assemblée Nationale qui en deviendra certainement un jour le doyen), et qu'une transformation s'impose. Pierre Méhaignerie en est l'un des exemples les plus frappants(1).
La solution quant à cet aspect particulier des choses est autre: il suffirait d'interdire le cumul des mandats, maladie propre à la France, sur la position 1 élu = 1 mandat. Secondo il faut limiter dans le temps ceux des élus qui se complaisent dans un carriérisme ravageur pour un renouvellement souhaité par tous et non un rajeunissement, la jeunesse n'étant pas un statut mais un marqueur sur une fiche d'Etat civil.
La lecture de cet article m'interpelle surtout quant aux plus grands absents, frappés d'inéligibilité depuis des décennies au sein des deux assemblées; je veux parler des classes populaires et classes moyennes(2). A cet égard, l'article dont il est question prend une toute autre tournure quant à la défense des élites de la nation, fussent-elles républicaines.
Le plus étrange, toutes choses égales par ailleurs, est que ces mêmes défenseurs tribuniciens des droits du citoyen lésé, se targuent d'être les contempteurs de la reproduction consanguine des élites libérales et énarchiques. Je ne vise pas ici les auteurs de l'article dont il est question, puisque j'assiste encore à mon grand âge à des colloques, universités d'été et autres forums de la vie de la Cité, quand bien même mon mandat unique de maire-adjoint est loin derrière moi.
La conclusion de l'article me laisse pantois:
"Or, aujourd’hui, concrètement, les cabinets locaux sont le lieu privilégié qu’ont choisi nombre de jeunes femmes et hommes pour parfaire leur apprentissage de la vie politique. Cette réforme verrouille leur envol. A qui profite le crime ? "
Il fut un temps, si peu éloigné de nous, où l'apprentissage se faisait dans les sections, seaux de colle à la main, actes militans sur les marchés, tracts à la main, dans les cages d'escaliers. Le syndicalisme, vous savez ce lieu où s'exerce la démocratie sociale et où se formait une élite ouvrière dans les Ecoles Normales éponymes?, et le milieu associatif, autre vivier, servaient à forger un futur 1er ministre, un président de l'Assemblée Nationale ou un président du Sénat. Il arrivait même, mais c'était ailleurs, sur une autre planète, qu'un peuple élût un syndicaliste électricien comme président.
Pauvre France qui verra un jour des égoïsmes remplacer ceux d'aujourd'hui! Oui à qui profite le crime?
Simon ARCHIPENKO
Président de Voltaire République
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