Surnommée « la Pompadour de Draveil », Brigitte Gruel, 53 ans, est l'autre visage de l'affaire Tron. L'adjointe à la culture du maire a également été mise en examen pour « viols et agressions sexuelles en réunion ».
C' est un pavillon sans charme, calé comme un lego dans un quartier résidentiel de Draveil (Essonne). Le store du premier étage est baissé, une voiture bouche l’entrée. A l’intérieur, Brigitte Gruel, adjointe à la culture à la mairie de Draveil, ne répond plus au téléphone. Elle n’a pas mis un pied dehors depuis la fin de sa garde à vue, le 23 juin dernier. Quarante-huit heures durant lesquelles l’élue et son patron, Georges Tron, ont dû répondre aux accusations proférées par deux anciennes employées municipales dans les locaux de la PJ de Versailles. L’ex-secrétaire d’Etat à la Fonction publique a ensuite été mis en examen pour « viols et agressions sexuelles en réunion par personne ayant autorité ». Brigitte Gruel, 53 ans, est également poursuivie pour « viols et agressions sexuelles en réunion ». Cassée, elle est ressortie du TGI d’Evry au bras de son époux, cadre retraité et ravagé.
Deux jours plus tard, Georges Tron inaugurait une base nautique de la commune. Brigitte Gruel, elle, ne trouve même plus la force de se rendre au marché. Cette belle blonde au brushing impeccable, sportive et toujours apprêtée, est en effet au cœur de toutes les rumeurs.
Ses « amis » de la majorité municipale, jaloux des relations privilégiées qu’elle entretient avec le maire, la surnomment « la Pompadour ». En ville, leur proximité fait jaser : « Elle lui sert de factotum, le conduit partout en voiture, l’écoute parler et fait passer les messages… » raconte un élu. Georges Tron et son adjointe déjeunent fréquemment au Gibraltar, un restaurant chic en bord de Seine. L’avocat du maire, Olivier Schnerb, admet « une immense complicité » entre son client et Brigitte Gruel. Mais, pour les élus de l’opposition, il ne fait aucun doute qu’elle est, depuis des années, la maîtresse de Georges Tron. Ainsi expliquent-ils l’ascension de cette mère au foyer, férue d’art contemporain, qui ne s’était jamais mêlée de politique auparavant. Vice-présidente de la communauté d’agglomération en 2001, puis chargée des marchés publics, elle est adjointe à la culture et à la vie associative à la mairie de Draveil depuis 2008.
Virginie Faux et Eva Loubrieu, les deux plaignantes, vont beaucoup plus loin. Selon elles, Brigitte Gruel, dont l’avocat, Franck Nathali, n’a pas souhaité répondre à Marianne, était la « rabatteuse » de Tron, une « perverse » qui n’hésitait pas à les pousser « à prendre une baby-sitter » en prévision des soirées de débauche…
Voici comment la première, ex-contractuelle, a raconté à la police les deux agressions dont elle avait été victime, à chaque fois en présence de l’adjointe à la culture. Le 12 novembre 2009, dans le bureau du maire, cette dernière lui aurait « caressé les épaules, la poitrine tout en [la] dégrafant […] M. Tron [lui] a pris la main pour [qu’elle] caresse la poitrine de Brigitte. [Elle a] entendu Brigitte faire une fellation à M. Tron ».
Quand elle évoque devant Marianne le deuxième viol, le 4 janvier 2010, Virginie Faux précise qu’il a eu lieu « au domicile de Brigitte Gruel, sur un canapé en cuir rose saumon. Il n’y avait pas de conversation entre eux, il ne lui demandait rien. Elle était active, prenait des initiatives sans trembler ».
Eva Loubrieu, elle, avoue aux policiers s’être « laissée caresser par Georges Tron sur la promesse d’être embauchée comme attachée territoriale », en janvier 2007. Puis, précise-t-elle aujourd’hui, elle en a « eu marre ». « C’est là qu’il m’a mis entre les pattes et sous la coupe de sa maîtresse, et que je suis devenue leur objet sexuel. Ça se passait une fois par mois, souvent chez elle, après qu’on eut déjeuné d’un plateau de fruits de mer et qu’ils m’eurent fait boire beaucoup de Sancerre. Ou encore à la communauté de communes, le soir… »
Eva Loubrieu a été licenciée en 2009 à la suite d’une procédure disciplinaire. La mairie de Draveil l’accusait d’avoir détourné la régie dont elle avait la charge. Après le remboursement des sommes (745,85 euros d’achats effectués chez Ikéa) réclamé par le procureur d’Evry, la plainte avait été classée sans suite. Virginie Faux, elle, a été remerciée en 2010, « suite à des problèmes d’alcoolisme » explique la maire adjointe chargée du personnel communal, Florence Fernandez de Ruidiaz. Selon maître Olivier Schnerb, qui considère que les deux femmes sont animées par « un désir de vengeance » suite à ces licenciements, et il ne fait aucun doute qu’« elles sont proches de l’extrême-droite de Draveil ». De fait, Eva Loubrieu s’était confiée, dès 2009, à François-Joseph Roux, ex-directeur de cabinet de Georges Tron, désormais salarié de la mairie de Vigneux. Selon lui, c’est parce que le maire savait qu’il « était au courant » qu’il l’a licencié. Dans l’entourage de Georges Tron, on livre une autre version : Roux entretient depuis les municipales de 1995 des relations avec les frères Jacques et Philippe Olivier (ce dernier est un ancien du MNR de Bruno Mégret, et le mari de Marie-Caroline Le Pen), installés sur la commune et en conflit ouvert avec le maire. Les frères Oliviers démentent, bien entendu, ces accusations.
La procureur d’Evry, Marie-Suzanne Le Quéau, a néanmoins estimé que les plaintes de Virginie Faux et Eva Loubrieu devaient être prises au sérieux. Aujourd’hui, les deux femmes en veulent autant à Georges Tron qu’à Brigitte Gruel : « Elle n’a pas réalisé le mal qu’elle a fait. Elle serait prête à suivre son grand homme jusqu’aux enfers », assurent-elles.
Stéphanie Marteau - Marianne