Après l'élimination de Cohn-Bendit - répondant plus ou moins, aux dernières volontés du défunt -, Eva Joly est arrivée largement en tête, au 1er tour, de la primaire. Nicolas Hulot a été sérieusement distancé, assurant pour ainsi dire, Mme Joly de la victoire au second tour. C'est aussi une surprise, au sein du groupe Europe Ecologie - les verts. Nicolas Hulot a été laminé, la vedette médiatique a été éliminée. C'était leur objectif stratégique prioritaire, leur principale motivation, et la tactique a fonctionné. Le scénario était implacable, du calendrier de primaire resserré à la campagne beaucoup trop courte, écartant le public de TF1. Et leur succès est total.
Mais c'est surtout le travail de la garde rapprochée de Noël Mamère, en 2002, quator d'apparatchicks d'extrême-gauche… A leurs yeux, Hulot était un mauvais symbôle. C'était TF1, l'audiovisuel, l'argent, les médias, Bouygues, les sponsors, que sais-je encore, bref le diable… Et ces-derniers sont parvenus à imposer la magistrate franco-norvégienne, parvenant à faire croire aux militants, qu'elle incarnait la tradition verte, en France, alors qu'elle avait pourtant été ramenée dans ses bagages par Daniel Cohn-Bendit, qui l'avait dérobé à Bayrou, en 2009. Il est vrai, la greffe a mis du temps à prendre, avec les militants. Elle ne plaisait pas, au début. C'était l'ancienne juge d'instruction de l'affaire Elf, et qui ne parlait que de justice et de paradis fiscaux, et guère de nucléaire, d'éoliennes, de sans-papiers. Son image d'ancienne magistrate, sa personnalité n'allait guère de pair, avec les traditions révolutionnaires de l'extrême-gauche française. Du point de vue l'image, la magistrate franco-norvégienne incarnait surtout ce dépassement des nations, chère à cette tendance de l'extrême-gauche, parfaitement assumée chez les verts, mieux dissimulée au PS.
Il est vrai, qu'outre son image sympathique d'ex-présentateur reconverti dans la lutte environnementale, Hulot était le plus emblématique de ce qu'il rejetait. Notamment par ses compromissions politiciennes avec l'UMP, au travers de son premier engagement associatif d'après 2007, ayant abouti aux accords du fameux “Grenelle de l'environnement”, et par ses amitiés avouées avec Sarkozy et Borloo, alors ministre de l'écologie et du développement durable. Une frange du mouvement écologiste en a bien vite fait, un épouvantail de circonstance, pour une part importante des militants. En revanche, Hulot partageait avec Joly, une semblable détestation des puissants. Mais Eva Joly a habilement joué le jeu, jusqu'au bout, en arborant fièrement sa double nationalité, et y allant de tous les poncifs chers à nos verts, de la dépénalisation du cannabis à la régularisation des sans-papiers, en passant par le mariage homosexuel. Il est vrai qu'en France, aussi étonnant que cela puisse paraître, les questions sociétales à contre-courant les intéressent beaucoup plus que l'environnement. C'est ce qui les relie historiquement à l'extrême-gauche soixante-huitarde, et c'est également, ce qui les coupe irrésistiblement de l'électorat populaire, les confinant dans une petite base électorale urbaine et diplômée. Ce sont les bobos et surtout pas les prolos.
Leurs confrères allemands progressent dans la société allemande, à l'image de cette récente victoire électorale dans le Bade-Wurtemberg (fief industriel de Daimler et de Porsche), en renouant avec la tradition plus conservatrice du courant écologiste des origines, plutôt située au centre-droit, renouant avec les valeurs de la démocratie chrétienne, se rapprochant des conservateurs et traitant avec l'industrie automobile, pour inventer la “nouvelle donne verte” outre-Rhin. Mais les verts français se refusent à toute évolution, à l'heure actuelle, s'assurant des raclées magistrales à chaque présidentielle, des 5 % de Noël Mamère en 2002, aux 1,57 % de Dominique Voynet en 2007. De quoi rassurer Borloo et le potentiel candidat PS, ravit de voir les verts se saborder eux-mêmes, au mieux une petite force d'appoint, guère apte à disperser leur électorat au 1er tour…
J. D.
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