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Après la perte de la souveraineté monétaire, la perte de la souveraineté budgétaire
15/06/2011 13:53
Projet d’intervention de Jean-Pierre Chevènement au Sénat sur le projet de loi constitutionnel sur l’équilibre des finances publiques, mardi 14 juin 2011.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Cette vingt-cinquième révision de la Constitution, la troisième de la législature, va exactement à l’inverse du but proclamé par celle de 2008 de « revaloriser, nous a-t-on dit, les droits du Parlement ».
Depuis toujours le Parlement vote le budget et autorise l’impôt. C’est pour cela qu’il a été fait. Le présent projet de loi constitutionnel vise à soumettre la loi de finances et la foi de financement de la Sécurité sociale à une loi-cadre d’équilibre, nouvel instrument juridique supérieur, dans la hiérarchie des normes, aux lois financières et à la loi ordinaire. Le Conseil Constitutionnel sera systématiquement saisi de la conformité des lois de finances et des lois de financement de la Sécurité Sociale à la loi-cadre (article 9).
Première observation : c’est transformer le Conseil Constitutionnel en gardien de la bonne gestion des finances publiques. Vision surréaliste : comment le Conseil Constitutionnel pourrait-il apprécier, à l’horizon de trois ans, la fiabilité des prévisions économiques et budgétaires nécessairement fragiles ?
Ces neuf pages, qui n’ont pas la science économique infuse, à supposer qu’elle existe, pourraient déclarer les lois financières inconstitutionnelles si elles ne sont pas conformes aux lois-cadres d’équilibre ! On croît rêver !
Je fais observer, au passage, que ce projet de loi constitutionnel qui prétend figer pour au moins trois ans les équilibres budgétaires est profondément attentatoire aux droits de l’opposition et à l’idée même d’alternance. Nous avons des élections générales en 2012. Si la gauche devait l’emporter, prétendez-vous lui interdire d’appliquer le programme qu’elle aura défini ? Je ne parle pas du programme du parti socialiste, mais de celui, sûrement différent, qu’aura défendu le candidat qu’elle soutiendra devant les électeurs. Le projet de loi constitutionnel est non seulement une atteinte à la démocratie mais aussi au bon sens : si ce projet de loi constitutionnel avait été adopté en 2007, eussiez-vous pu faire voter, en 2008 un projet de loi pour venir au secours des banques, en 2009 un plan de relance pour lutter contre la récession, et en 2010 le lancement d’un grand emprunt pour impulser – insuffisamment d’ailleurs – les secteurs d’avenir ? On vous demande de voter ce projet « quia absurdum ». Parce qu’il est absurde !
En second lieu, le projet de loi constitutionnel vise à créer un monopole pour les fois financières, assorti de procédures d’irrecevabilité pour tout amendement à une loi ordinaire ou toute proposition de loi ayant une incidence fiscale. C’est une atteinte si grave au droit d’initiative parlementaire, aux prérogatives des Commission et à la loi elle-même que votre Commission des Lois propose d’y substituer « une compétence exclusive des lois financières pour déterminer l’entrée en vigueur des mesures relatives aux prélèvements obligatoires » (article 1er du projet de loi issu des travaux de la Commission).
Je ne discerne pas clairement en quoi ce dispositif, sûrement ingénieux, rendrait aux parlementaires et aux Commissions leur droit d’initiative dans la discussion d’une loi ordinaire, dès lors que sa validation resterait suspendue à l’adoption d’une loi de finance ultérieure. C’est vider de leur substance l’essentiel des travaux parlementaires, puisque le gouvernement disposera toujours d’une séance de rattrapage - si je puis dire – pour couper court aux mesures qui lui déplairaient, d’une loi préalablement votée par le Parlement. Le projet de loi constitutionnel n’attente pas seulement aux prérogatives du Parlement. Il attente aussi, paradoxalement, à celles du gouvernement puisque désormais celui-ci ne pourra plus agir par la voie des ordonnances de l’article 38, dès lors que celles-ci pourraient entrer dans le champ infiniment vaste des lois-cadres d’équilibre qui – je cite – « fixent des règles, des principes, des orientations, des normes, des plafonds de dépenses et des planchers de recettes, etc. » Bonne chance pour quiconque – Parlement, gouvernement, Conseil Constitutionnel – pour se retrouver dans le galimatias de cette usine à gaz !
En troisième lieu enfin, et suprême hypocrisie, le projet de loi constitutionnel prétend introduire dans notre Constitution un article 88-8 censé « associer le Parlement aux engagements européens ». C’est tout le contraire qui est vrai ! Nous sommes au cœur du processus de dessaisissement du Parlement.
Le projet prétend soumettre au Parlement quinze jours avant sa transmission à la Commission européenne, en avril de chaque année, le « projet de programme de stabilité ». En réalité, celui-ci définit des normes concertées, entre les cabinets ministériels français et les institutions européennes. Le Parlement qui vote le budget vers le 20 décembre est entièrement dessaisi, dès le mois d’avril, de sa compétence budgétaire fondamentale. Pour organiser ce « semestre européen », cinq propositions de règlements européens et une proposition de directive sont en cours d’élaboration.
En vertu du « pacte de compétitivité » Merkel-Sarkozy, encore appelé « pacte pour l’euro », adopté par le Conseil européen des 24 et 25 mars 2011, les volets préventifs et correctifs du pacte de stabilité et de croissance seraient renforcés : le volet préventif comporterait un principe de limitation de la croissance annuelle des dépenses par rapport à la croissance du PIB et l’obligation de constituer un dépôt portant intérêt, en cas d’écart important par rapport à la trajectoire. Volet correctif : en cas de déficit excessif, des mécanismes de sanction interviendraient, non plus de manière automatique, mais sur décision du Conseil selon, toutefois, des règles de majorité inversée véritablement extravagantes : la sanction s’appliquerait s’il n’y avait pas trois cinquièmes des Etats pour s’y opposer !
Une proposition de directive enfin prévoit « la mise en place d’une planification budgétaire pluriannuelle s’appliquant à l’ensemble des administrations publiques » et « des règles budgétaires chiffrées faisant l’objet d’un contrôle effectif ».
Pouvez-vous nous en dire plus sur ces novations institutionnelles qui me paraissent nécessiter, en toute logique, la révision du traité de Lisbonne ?
Le projet de loi constitutionnel qui nous est soumis ne peut se comprendre en dehors de la proposition de directive dont il reprend, selon nos informations la plupart des termes, dans ses articles 7, 8 et 9. On a là par avance un exemple instructif de la manière dont s’articuleront les décisions budgétaires nationales et les orientations de la programmation européenne. On n’attend même pas que les institutions de Bruxelles aient statué pour se conformer aux dispositions qu’elles sont déjà réputées avoir prises !
Nous sommes en plein fédéralisme budgétaire, selon la novlangue inventée par MM. Trichet et Strauss-Kahn, même si nous n’avons pas encore un « ministère des finances européen », selon le vœu du Président de la Banque centrale. Curieusement, ce ministère de fait ne se préoccupe que de la mise sous contrôle des budgets publics et néglige complètement l’endettement privé dont on sait qu’il est à l’origine de la crise financière. [Ainsi l’Espagne répondait pleinement aux critères de Maastricht et du pacte de stabilité, mais elle est en passe de devenir le vrai maillon faible de la zone euro, en raison de l’endettement des ménages et des banques et des taux prohibitifs auxquels elle est contrainte d’emprunter sur les marchés financiers (plus de 5 % en dix ans).]
Le Parlement sera ainsi mis devant le fait accompli dans l’élaboration des lois financières. Le « semestre européen » instaure dès le début du printemps un véritable « cycle de surveillance ». Dès juillet, les institutions communautaires adressent leurs observations aux Etats-membres. Votre rapporteur, M. Hyest, parle de « chaînage vertueux » (p. 69 de son rapport). Le mot enchaînement ne serait-il pas plus pertinent ?
Le projet de programme de stabilité, selon un amendement arraché par l’Assemblée Nationale, pourrait donner lieu à un débat public à l’initiative du gouvernement ou d’un groupe parlementaire. Débat en trompe l’œil, encore une fois ! On l’a déjà vu. La technostructure européiste, de Bruxelles et de Paris, sera seule maitresse de la recette de la sauce à laquelle nous serons mangés. Le projet de loi constitutionnalise à l’avance, à travers la création de lois-cadres d’équilibre, la soumission de notre budget et de notre protection sociale à la programmation de l’austérité par Bruxelles.
Cette machinerie compliquée échappe totalement à l’opinion publique et à la majorité des parlementaires. Elle n’a qu’un but : dessaisir le Parlement de ses compétences et de son rôle, ruiner ce qui reste de démocratie dans notre pays.
C’est un coup d’Etat permanent dont nous serons l’objet à travers ces lois-cadres d’équilibre. Hier le Traité de Maastricht nous a privés de notre souveraineté monétaire. Aujourd’hui c’est de la souveraineté budgétaire qu’on veut nous dessaisir. L’enchaînement est parfaitement logique !
Dès le départ, la monnaie unique a été conçue comme une monnaie politique, comme le levier d’un fédéralisme européen. En vain le Peuple, consulté par référendum le 29 mai 2005, a-t-il exprimé son rejet. On lui a imposé à travers le traité de Lisbonne, la « substance de la Constitution européenne ». Ce déni de souveraineté n’a pu empêcher la réalité de se faire jour : on nous avait promis hier que l’euro nous sauverait. Aujourd’hui, il faut sauver l’euro à travers des plans d’austérité renforcés.
Le ver, en réalité, était dans le fruit dès l’origine. On a toujours voulu faire l ‘Europe en ignorant la réalité des nations. C’est le vice initial de Maastricht : on a transféré le pouvoir monétaire à une Banque Centrale indépendante, sorte de Buba-bis n’ayant d’autre mission que de lutter contre l’inflation, et cela dans une zone économique et monétaire composée de dix-sept pays loin d’être homogènes : [les différents pays de la zone euro ont des structures économiques différentes. Leurs politiques divergent et la déflation salariale pratiquée en Allemagne depuis dix ans n’a pas peu contribué aux déséquilibres internes survenus depuis lors. Les repères culturels ne sont pas les mêmes. Dans chaque pays vit à son rythme une démocratie particulière].
Aujourd’hui la réalité se venge. Les marchés financiers creusent entre les différents pays des écarts de taux insoutenables. Le fonds européen de stabilité financière n’est pas suffisamment doté pour faire face aux demandes d’aide des pays en difficulté. Et l’Allemagne est fortement réticente pour prêter à des pays qu’elle considère comme impécunieux. Elle n’est pas prête à faire pour le Péloponnèse l’effort qu’elle a fait pour le Brandebourg, tant il est vrai – et cela se comprend - que la solidarité européenne n’a pas la même force que la solidarité nationale !
L’Allemagne, plutôt que d’assouplir sa politique, entend donc durcir, avec la caution de la France, les plans d’ajustement au sein de la zone euro. C’est de cela qu’il est question à travers ce projet de loi de réforme constitutionnelle.
En fait, les marchés financiers dictent leur loi : M. Sarkozy explique la nécessité de la RGPP, et de différentes « réformes » qui tendent toutes à l’abaissement du coût du travail par le souci de conserver le triple A que les agences de notation accordent à la France.
Comment mieux avouer que « Standard and Poors » pèse désormais plus lourd que la souveraineté populaire ? Or, les peuples européens refusent cette perspective d’austérité à perpétuité s’appliquant aux salaires, aux retraites, aux services publics et aux moyens de l’Etat lui-même. On le voit à chaque élection. Les peuples refusent d’être mis en coupe réglée par le capitalisme financier. Ils ne veulent pas d’une Europe qui s’identifie à la régression et au déclin. Il faut donc leur en offrir une autre, qui signifie, à l’inverse, croissance et progrès social.
M. Sarkozy nous parle de la dette qu’il a contribué à creuser. Mais pour résorber la dette, la croissance est plus efficace que la récession ! Je n’ai pas été partisan de Maastricht. L’euro, monnaie à la fois branlante et surévaluée asphyxie notre économie et accélère notre désindustrialisation. Mais l’euro existe. Mieux vaudrait le réformer en changeant ses règles du jeu : mission de la BCE étendue au soutien de la croissance et de l ‘emploi - l’inverse de ce qu’elle s’apprête à faire en relevant ses taux d’intérêt ! -, politique de change visant à rapprocher le cours de l’euro de son cours de lancement : 1$16 centimes au lieu de 1$45 aujourd’hui, rachat des titres de dette publique sur les marchés pour casser la spéculation. En deuxième lieu, modification des traités européens pour autoriser le lancement d’un grand emprunt destiné à financer les infrastructures et les programmes de recherche. Enfin et surtout, initiative européenne de croissance concertée, à travers un plan de relance salariale décliné par pays. Le moins qu’on puisse dire est qu’on ne prend pas aujourd’hui le chemin de cette réforme qui mettrait l’Europe au service du progrès.
Ou bien donc les pays de la zone euro seront capables, ensemble, d’inverser leur politique : des élections générales auront lieu en 2012-2013 dans les principaux d’entre eux. Ou bien ils seront rattrapés par la crise de l’euro. Le système de l’euro ne survivrait pas à la cure d’austérité généralisée à laquelle on vous demande par avance de vous résigner.
On n’évitera sans doute pas de faire évoluer le système de l’euro vers des formules praticables en revenant par exemple à l’idée de monnaie commune, soutenue jadis par les Britanniques et en France par MM. Bérégovoy et Balladur, monnaie commune utilisable dans les paiements extérieurs et permettant des ajustement négociés à l’intérieur d’un SME bis, entre des déclinaisons monétaires nationales. On éviterait ainsi les dévaluations sauvages, dites « compétitives ». Un tel système maintiendrait un « toit européen commun » et permettrait l’extension de cette monnaie commune au continent tout entier. Car contrairement à ce qu’a dit M. Sarkozy, « l’euro n’est pas l’Europe » : la Grande Bretagne, les pays scandinaves, les PECOs, sans parler de la Russie et des pays de l’Euroméditerranée se tiennent au dehors.
Un tel système euro réformé éviterait les dévaluations internes par la baisse des salaires dont chacun voit bien, en Grèce et ailleurs, qu’elles sont à la fois insupportables et inefficaces. Encore faudrait-il préparer cette mutation ordonnée du système de l’euro pour le mettre au service d’un nouveau dessein de progrès pour l’Europe. C’est une tout autre voie que le chemin de coercition budgétaire et sociale où on veut entrainer subrepticement notre pays en commençant par le Parlement, à travers cette nouvelle réforme de la Constitution, coup d’Etat silencieux, ourdi dans le dos du peuple.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? vous demandais-je en commençant mon intervention. Il vaudrait mieux renvoyer les Chambres dans le néant, comme le 10 juillet 1940, à Vichy, tant il est vrai comme le disait Pierre Mendès-France, dans son discours du 18 janvier 1957 à l’Assemblée Nationale, sur le projet du traité de Rome, que « l’abdication d’une démocratie peut prendre deux formes : soit le recours à une dictature interne par la remise de tous les pouvoirs à un homme providentiel, soit la délégation de ces pouvoirs à une autorité extérieure, laquelle, au nom de la technique, exercera en réalité la puissance politique. »
Vision prémonitoire d’un des derniers grands républicains !
On a envie de dire : « Mendès-France, De Gaulle, réveillez-vous ! ils sont devenus fous ! »
Heureusement votre projet de révision constitutionnelle n’a pas la moindre chance d’aboutir. Il n’y aura pas dans un Congrès, à Versailles, une majorité des trois cinquièmes pour autoriser cette nouvelle abdication avant 2012.
Jean Pierre Chevènement
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"Humour corrézien" : "Chirac est taquin", selon Dominique de Villepin
15/06/2011 13:49
Les propos de Jacques Chirac affirmant, samedi, qu'il voterait François Hollande en 2012 continuent à faire des vagues.
"Jacques Chirac est un homme à la fois taquin, provocateur et surtout plein d'humour", a déclaré sur France Inter M. Villepin qui fut premier ministre de l'ancien chef d'Etat et un de ses plus proches conseillers comme secrétaire général de l'Elysée.
"Ce qui est sûr, c'est qu'il y avait quelque chose de pince-sans-rire" dans ses propos, a-t-il ajouté.
Selon lui, Jacques Chirac n'avait sans doute "aucune idée qu'il y avait une perche de micro au-dessus de lui qui guettait le moindre de ses mots".
Et s'il les a répétés plusieurs fois, "c'est parce qu'il n'entend pas forcément bien, donc il répète, pour être sûr que ses interlocuteurs comprennent le message". "Mais je crois qu'il y avait tout dans cette affaire d'une vraie fausse boutade", a-t-il dit.
Le président de République solidaire revendique "trois droits pour Jacques Chirac : premièrement le droit à la liberté, Chirac est comme il est, il s'exprime avec une très grande liberté ; deuxièmement, le droit à l'humour, il a le droit d'avoir sa forme d'humour spécifique et enfin le droit au repos".
Jacques Chirac "a beaucoup servi notre pays et il a le droit qu'on le laisse aller dans des expositions ici et là sans être poursuivi par toutes sortes de caméras", a affirmé M. de Villepin.
Sources: Le Monde, AFP
http://2villepin.free.fr/index.php/2011/06/13/1934-humour-correzien-chirac-est-taquin-selon-dominique-de-villepin
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Les Vikings à l’assaut de Bruxelles
15/06/2011 13:45
Copenhague, mercredi 11 mai 2011 : avec l’annonce par le Danemark du rétablissement permanent des contrôles douaniers à ses frontières avec l’Allemagne et la Suède, pour lutter contre l’immigration illégale et la criminalité organisée, c’est un véritable coup de tonnerre qui vient de se produire dans le landernau européen, à un moment où les institutions bruxelloises peinent plus que jamais à trouver la parade qui permettrait enfin aux Etats membres de l’espace Schengen de se protéger efficacement des arrivées massives de migrants provenant de partout, de l’Afrique du Nord à la frontière gréco-turque.
Vingt-six ans après la signature, le 14 juin 1985, des accords de Schengen, entre les cinq premiers États signataires (France, Allemagne, Belgique, Pays-Bas et Luxembourg), la patrie du poète et conteur Hans Christian Andersen vient ainsi de faire un pied de nez inattendu à Bruxelles en décidant unilatéralement de snober l’un des dogmes de la construction européenne : la liberté de circulation des biens et des personnes à l’intérieur des frontières de l’Union européenne.
Pour les observateurs attentifs de la vie politique danoise, cette initiative n’était guère surprenante venant de la part d’un gouvernement de minorité de centre-droit qui, à cinq mois d’élections législatives qui s’annoncent décisives, cherche pour l’heure à s’attirer les bonnes grâces du très influent parti populiste de droite Dansk Folkeparti (Parti du Peuple danois), dont les exigences, notamment sur la question centrale de l’immigration, obligent dorénavant le parti libéral du Premier ministre Anders Fogh Rasmussen à composer inlassablement avec une formation politique puissante qui dispose désormais de 25 députés au Folketin.
Aux yeux des partisans d’une Europe supranationale, qui ne tolèrent l’expression d’aucune forme d’indépendance politique, pareille mesure est à coup sûr intolérable : cette décision n’a-t-elle pas été annoncée sans la moindre concertation préalable avec les autres pays concernés, à l’initiative, de surcroît, d’un gouvernement appelé à présider l’Union européenne à compter du 1er janvier 2012…?
Ainsi donc, n’ayant que faire de la menace bruxelloise, le Danemark a décidé de faire cavalier seul en manifestant, une fois de plus, sa volonté opiniâtre de ne pas s’en laisser compter. A vrai dire, pour quiconque s’intéresse à l’histoire récente de ce pays, vue sous l’angle de son itinéraire européen, force est de faire l’éloge d’une nation exemplaire qui réalise la démonstration quotidienne de sa vitalité démocratique et de son esprit de résistance.
C’est en pleine euphorie économique des Trente Glorieuses que le Danemark avait décidé de rejoindre, le 2 octobre 1972, le traité de Rome, à l’issue d’un référendum qui devait recueillir une large adhésion de son peuple (56,7 % de «oui»). Depuis lors, c’est peu dire que le plus petit des pays scandinaves s’est toujours signalé par son peu d’enthousiasme à s’engager pleinement dans un processus de construction européenne qui devait, à partir de l’Acte unique, s’éloigner insensiblement des objectifs assignés à ses débuts, soit en l’occurrence une communauté économique et commerciale, pour y substituer irrésistiblement un modèle politique autoritaire qu’il a toujours farouchement repoussé. Toujours prudent, le Danemark a su préserver heureusement un précieux garde-fou dans le texte de sa Constitution : tout projet de loi autorisant un transfert de souveraineté à des autorités supranationales requiert l’organisation obligatoire d’un référendum.
De l’Acte unique au traité de Maastricht
Cette défiance à l’égard de la construction européenne, les Danois devaient la marquer d’abord en se montrant fortement réservés à l’égard de l’Acte unique, adopté sans enthousiasme lors du référendum du 27 février 1986 (42 % de «oui» ; 32,7 % de «non» ; 25,3 % d’abstentions), mais c’est surtout avec le traité de Maastricht que ces lointains descendants des Vikings firent preuve de leur légendaire esprit d’indépendance : soumis au vote du peuple danois, le 2 juin 1992, le traité sur l’Union européenne fut rejeté avec 50,7 % des voix, alors que son Parlement l’avait adopté, un mois plus tôt, avec 125 voix pour et 25 voix contre…
La capacité de Bruxelles à réagir rapidement fut à la mesure du cataclysme politique produit par l’insolence danoise. Inaugurant, lors du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernements d’Edimbourg de décembre 1992, une méthode qui devait faire florès par la suite, le gouvernement de Copenhague obtenait de ses partenaires un nouveau texte, taillé sur mesure, appelé pour le coup à ne s’appliquer à aucun autre État membre : ses réserves furent prises en compte en matière de politiques de défense, de citoyenneté, de justice et de sécurité intérieure, mais surtout, en ne participant pas à la création de la monnaie unique, le Danemark devait conserver ses compétences nationales en matière monétaire.
Le traité de Maastricht ayant fait de la sorte peau neuve, les Danois devaient se résigner à une séance de rattrapage, lors d’un deuxième référendum organisé le 18 mai 1993 : le traité fut alors largement accepté avec 56,8 % des voix.
La lancinante question de l’Euro
A ce stade de la construction européenne, la question de la monnaie unique et celle de la disparition corrélative de la couronne danoise ne pouvaient que cristalliser toutes les attentions ; à la suite de l’adoption par 11 États membres de la monnaie unique, le 1er janvier 1999, le gouvernement danois décida de consulter le peuple sur l’entrée du Danemark dans la zone euro, lors du référendum du 28 septembre 2000. Le revers fut cinglant pour la nomenklatura européiste : avec une participation de 86 %, 53,1 % des électeurs rejetèrent l’euro !
Avec le Royaume-Uni, le Danemark est donc le seul État de l’Union européenne à bénéficier en matière monétaire d’une clause dérogatoire qui lui permet de rester durablement en dehors de la zone euro et de conserver l’usage de sa monnaie nationale. Au vu de ses résultats économiques actuels, plutôt florissants, le pays ne s’en porte pas si mal…
Si le Danemark ne prévoit pas d’organiser dans l’immédiat un nouveau référendum sur l’adoption de l’euro, le Premier ministre Rasmussen a toutefois estimé devant le Parlement, en février 2011, que Copenhague pourrait changer d’avis à la faveur d’une proposition franco-allemande visant à renforcer la coopération économique au sein de la zone euro. Mais, selon les sondages actuels, les Danois restent majoritairement opposés à l’adoption de la monnaie européenne…
La mascarade de la ratification du traité de Lisbonne
Dûment vaccinés, lors des consultations électorales touchant aux questions européennes, par des précédents plutôt fâcheux, les gouvernements danois, de tendance libérale comme de sensibilité sociale-démocrate, s’étaient bien gardés de soumettre la ratification du traité de Lisbonne à référendum. Pour contourner toutefois l’obligation constitutionnelle de recourir en pareil cas à la consultation populaire, le Premier ministre actuel Rasmussen s’appuya, en décembre 2007, sur une expertise du ministère de la Justice suivant laquelle le texte final du traité de Lisbonne n’opérerait, contre toute évidence, aucun transfert de la souveraineté du pays, au grand dam de nombre de formations politiques, dont le Parti du Peuple Danois qui, non sans raisons, dénoncèrent, avec l’utilisation de ce procédé malhonnête, une indécente manipulation politique.
Le résultat de cette grossière manœuvre de contournement du vote populaire était attendu par tous : largement acquis à la cause européiste, le Parlement devait massivement ratifier le traité de Lisbonne par 90 voix contre 25, le 24 avril 2008…
En vérité, la messe n’est pas dite car le dossier pourrait connaître, dans un proche avenir, d’intéressants rebondissements juridiques. Le 11 janvier 2011, la Cour suprême a reconnu en effet, à l’unanimité de ses membres, l’intérêt à agir de 35 ressortissants danois à poursuivre le Premier ministre Rasmussen, au motif que le chef du gouvernement aurait violé la Constitution en ratifiant le traité de Lisbonne par un vote parlementaire plutôt que par voie référendaire : la plus haute juridiction danoise va devoir désormais examiner le fond de l’affaire et dire si le traité de Lisbonne a bien été ratifié selon la légalité constitutionnelle. Chacun mesure ici l’enjeu considérable d’une procédure constitutionnelle qui pourrait désavouer la ratification danoise, par voie parlementaire, d’un traité de Lisbonne dont la parfaite entrée en vigueur suppose qu’il ait été ratifié définitivement dans l’ensemble des pays membres de l’Union européenne. Affaire à suivre…
Des prétentions bruxelloises visant à se procurer coûte que coûte des ressources budgétaires propres, en mettant à contribution les peuples européens, à l’obligation désormais imposée aux Vingt-sept de soumettre leurs budgets nationaux au crible pointilleux de la Commission, de la modification en cours du traité de Lisbonne destinée à mettre en place un mécanisme permanent de stabilité pour la zone euro, sans la moindre consultation référendaire, à la suggestion récente du Président de la Banque centrale européenne, Jean-Claude Trichet, de doter l’Union européenne d’un ministre des finances, l’offensive totalitaire des institutions supranationales de Bruxelles contre les souverainetés des Etats membres de l’Union européenne s’intensifie chaque jour un peu plus.
Devant pareille actualité, plus alarmante que jamais, quels enseignements peut-on tirer, au bénéfice de la France, de la singulière expérience danoise ?
1. Lorsque, à la faveur d’une consultation référendaire portant sur les questions européennes, la parole est occasionnellement donnée au Peuple et qu’il exprime alors un message discordant qui place ses oligarchies en porte-à-faux vis-à-vis de la doxa européiste, celui-ci est aussitôt bâillonné, par tous moyens, et, à défaut de pouvoir le contraindre à se déjuger à l’occasion d’un second référendum, le recours à la voie parlementaire est alors la méthode la plus communément employée pour mieux contourner le vote populaire, : comme les Français, les Néerlandais ou les Irlandais, les Danois en ont fait pareillement l’amère constat. Si, pour mieux s’en défendre à l’avenir, nos compatriotes avaient pleinement conscience de la réalité de ces pratiques douteuses, aujourd’hui notoirement méconnues, l’entreprise européiste y perdrait assurément de son emprise idéologique sur les esprits.
2. Aucun combat n’est perdu d’avance s’il est mené avec lucidité et détermination. A défaut de pouvoir avoir recours à l’action contentieuse, faute de cadre juridique possible, pour faire échec à une initiative qui mettrait en péril l’indépendance et la souveraineté d’un pays, l’expérience danoise nous enseigne, avec l’épisode récent de la suspension des accords de Schengen, que l’action unilatérale est une option politique qui demeure toujours ouverte, quelles que soient les rigueurs des rapports de force en présence, pour peu que l’opinion publique, aussi bien que les formations politiques soucieuses de l’intérêt supérieur de la nation, s’attachent dans un même élan vital à se gendarmer courageusement.
3. Quitte, pour un pays, à composer tactiquement avec le système européiste, autant lui arracher dès à présent l’octroi de traitements particuliers qui préservent avantageusement l’essentiel de ses intérêts primordiaux ! A l’instar, par exemples, du Danemark ou du Royaume Uni qui ont tout lieu de se féliciter de fonctionner aujourd’hui avec des systèmes monétaires domestiques qui échappent aux travers tragiques de la zone euro, la France serait bien inspirée de cultiver cette méthode prudente de gestion des affaires publiques et de renégocier, partout où le besoin impérieux pour ses intérêts se fait le plus sentir, des statuts dérogatoires au droit commun, en attendant de pouvoir se libérer définitivement du carcan rigide d’une Union européenne si peu réformable.
4. Tous les peuples européens, surtout parmi ceux qui sont les plus réfractaires à l’idéologie européiste, à l’exemple du Danemark ou de la France, doivent à présent en convenir : plus aucune décision politique, qui serait prise au plan national ou à l’échelle européenne et dont l’objectif ou l’effet serait de conduire à la dépossession de leurs souverainetés, ne doit désormais échapper si peu que ce soit à leurs assentiments. Pour ce qui la concerne, la France ne fera assurément pas l’économie à l’avenir d’une réforme constitutionnelle qui gravera demain dans le marbre de la Constitution l’ardente l’obligation de soumettre systématiquement tout nouveau transfert de souveraineté à un référendum, dont l’initiative et la mise en œuvre, ainsi préservées de toute emprise politicienne, relèveront de la compétence sanctuarisée du seul Conseil constitutionnel, dans le sillage de la pratique vertueuse inaugurée outre-Rhin par la Cour constitutionnelle de Karlsruhe, à la suite de son arrêt fondateur rendu le 30 juin 2009.
Karim Ouchikh
http://www.gaullisme.fr/2011/06/14/les-vikings-a-l%e2%80%99assaut-de-bruxelles/
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Deux mariés ne font pas deux pères !
15/06/2011 13:41
Faut-il enterrer la mixité au nom de l’égalité ?
Non, le PS n’est pas le parti des vieux mâles blancs hétérosexuels, machos patentés et violeurs potentiels quoique présumés. Il aime les femmes, les pauvres, les immigrés et les minoritaires en tout genre. À défaut de compter dans leurs rangs des bataillons de femmes de chambres issues de l’immigration, les socialistes ont ressorti des tiroirs le mariage homosexuel et l’antienne qui va avec, reprise en chœur par une bonne partie des commentateurs, sincèrement désolés par notre conservatisme : « la France est en retard ! ». D’ailleurs, à en croire les sondages, 58 % des Français y seraient favorables: bizarre, je n’avais pas remarqué que les désirs des Français étaient des ordres.
Peu importe que le texte proposé à l’Assemblée nationale n’ait aucune chance d’être adopté. L’essentiel c’est qu’Aurélie Filipetti soit fière de le défendre et que le PS rappelle que sa vocation naturelle est d’indiquer le sens de l’Histoire à ses contemporains. Une petite pancarte pour rappeler aux étourdis que « le Progrès, c’est par ici Messieurs-Dames ».
On a bien sûr le droit d’être favorable au mariage gay. L’ennui, c’est qu’on ne puisse pas s’y opposer. Or, il est bel et bien en train de rejoindre d’autres grandes causes au rayon des propositions qu’on ne peut pas refuser. Refuser de s’enthousiasmer pour cette avancée incontestable au sens le plus strict du terme, c’est afficher non pas son homophobie mais pire, sa ringarditude indécrottable. Ben quoi, ça leur fait plaisir et ça gêne personne, où est le problème ? On est tous égaux, non ? Comme l’a dit François Hollande, « on ne va pas empêcher deux personnes qui s’aiment de s’unir ». Ce serait très méchant. Et moi, je suis gentille. Notons au passage le caractère performatif du désir : puisque je veux ceci ou cela, il est bien normal que la société se débrouille pour me le procurer. Je vous enverrai ma petite liste.
Quoi qu’il en soit, je n’ai rien à redire au mariage lui-même. Je croyais que c’était vachement bien qu’on ait arraché l’amour, le sexe et même la procréation à cette institution bourgeoise. Mais puisqu’il s’avère décidément impossible de jouir sans entraves, la chaine conjugale en vaut bien une autre – en plus, si on se marie, on a une petite chance de pouvoir accuser son chacun/chacune de « viol conjugal », mais ça, les enfants, ce sera pour la prochaine leçon.
Les homosexuels ont conquis le droit aux charentaises et au samedi après-midi chez Carrefour. S’ils veulent, en prime, la robe « princesse d’un jour », la pièce montée et le banquet de famille avec Pépé qui prend sa cuite, sans oublier le divorce qui conclut une bonne proportion des mariages avant cinq ans, grand bien leur fasse.
Il y a un petit problème, c’est qu’on n’a pas inventé le mariage pour que les Roméo et Jules de tous sexes puissent afficher à la face du monde leur amour interdit mais pour protéger la filiation – et sa conséquence la plus terre-à-terre, l’héritage. Que le mariage veuille dire « toi et moi pour la vie » pour les individus concernés, c’est très joli, mais du point de vue de la collectivité, il signifie d’abord que les enfants de madame sont réputés être ceux de monsieur, pour le reste que chacun garde ses secrets d’alcôve. Et cette salutaire hypocrisie a permis la transmission des biens et des codes à travers un ce truc bancal, mouvant, oppresseur et génial qu’on appelle « famille ».
Donc sans filiation, pas de mariage. Du reste, les partisans de l’homo-conjugalité n’en font pas mystère, leur but est de faire reconnaître l’homoparentalité. Or, ça, ça me chiffonne. Je vous vois venir, traînant derrière vous des cohortes d’enfants déglingués par des couples banalement composés d’un homme et d’une femme. Objection parfaitement valable : à l’évidence, deux hommes ou deux femmes peuvent élever un enfant aussi bien ou aussi mal qu’une paire hétéro. Que l’on invente un statut répondant aux nécessités concrètes d’une telle situation, fort bien : il est bon que les moules autoritaires et rigides se heurtent à la plasticité de la vraie vie que fabriquent ensemble les sujets autonomes. Pas besoin d’être estampillé « père » ou « mère » pour pouponner ou aller récupérer un ado au commissariat.
Sauf qu’il ne s’agit pas de la vraie vie mais d’un ordre symbolique qui doit bien avoir quelques vertus pour avoir traversé les siècles et les civilisations. Et cet ordre symbolique repose sur ce minuscule détail qu’est la différence entre les hommes et les femmes. Nul n’est obligé de s’accoupler avec le sexe opposé ni de participer à la reproduction de l’espèce. Mais il me semble que celle-ci relève littéralement de l’intérêt général. Roméo peut partir en voyage de noces avec Jules si ça lui chante, il n’en a pas moins intérêt à ce que Juliette fasse des mômes avec le godelureau de son choix. Demander à la société de dire à un enfant qu’il a deux « papas » ou deux « mamans », ce n’est pas seulement se vautrer dans la niaiserie langagière qui enchante le journaliste, c’est institutionnaliser un mensonge anthropologique – en tout cas tant que la science n’aura pas corrigé les cochonneries de la nature et permis à chacun de commander l’enfant de son choix à l’enfanterie du coin. « Le droit de l’enfant à vivre dans une famille épanouie, avec de l’amour, n’est pas lié au sexe des parents », proclame Henriette Martinez, l’une des deux élues UMP à avoir voté le texte. En attendant qu’un juge fasse respecter ce droit à l’amour, j’aimerais rappeler que nous avons tous également le droit inaliénable de ne pas être pris pour des cons. Même les enfants.
Elisabeth Lévy
photo : bkusler (Flickr)
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La zone euro prête à éclater
15/06/2011 13:37
Dans une tribune publiée ce matin par le Financial Times, l'économiste américain Nouriel Roubini, qui avait été l'un des rares à prédire la crise financière de 2008, annonce l'explosion de l'euro d'ici moins de cinq ans, "en particulier si certaines des économies périphériques stagnent". Pour Roubini, la solution d'une sortie de l'union monétaire risque d'être bientôt envisagée sérieusement, "les avantages à y rester étant plus faibles que les bénéfices d'en sortir".
Combien de temps reste-t-il à l'Euro ?
L’approche confuse de la crise de l’euro-zone a échoué dans la résolution des problèmes fondamentaux de divergence économique et de compétitivité au sein de l’Union. Si cette situation se poursuit, l’euro s'orientera vers une restructuration désordonnée de la dette, et éventuellement vers un éclatement de la zone monétaire elle même, certains de ses membres plus faibles se trouvant en situation de faillite. L’Union économique et monétaire n’a jamais vraiment satisfait aux conditions d'une zone monétaire optimale. A la place, ses dirigeants espéraient que l'absence de politiques monétaire, fiscale et de taux de change forcerait à son tour une accélération des réformes structurelles. Celles-ci, espérait-on, verraient la productivité et les taux de croissance converger. La réalité s’est avérée bien différente. Paradoxalement, l’effet de halo de la convergence des taux d’intérêts à court terme a conduit à une plus grande divergence des politiques fiscales. Un défaut insouciant de discipline de pays comme la Grèce et le Portugal n’avait d’égal que l’accumulation de bulles spéculatives dans d’autres pays tels que l’Espagne et l’Irlande. Les reformes structurelles ont été retardées, tandis que l’augmentation des salaires et celle de la productivité ont divergé. Le résultat fût une perte de compétitivité en périphérie. Toutes les unions monétaires qui ont réussi ont finalement été combinées à une union politique et fiscale. Mais les élans européens vers une union politique ont été entravés, tandis que le mouvement vers une union fiscale exigerait de significatives recettes fédérales centrales, ainsi qu'une émission généralisée d’obligations en euro - dans laquelle les impôts des contribuables allemands (et autres) n'endiguerait pas seulement la dette de leur pays mais aussi celle des Etats-membres de la périphérie. Il est peu probable que les contribuables de base acceptent cela. La réduction de la dette de la zone euro ou son "reprofiling" (sa restructuration, nldr) aidera à résoudre le problème de la dette excessive de certaines économies insolvables. Mais ceci ne contribuera en rien à établir une convergence économique, qui exige l'instauration d’une convergence de compétitivité. Sans cela, la périphérie simplement stagnera. A ce stade, les options sont limitées. L’Euro pourrait brusquement voir chuter sa valeur face au Dollar américain, pour restaurer la compétitivité de la périphérie ; mais une chute brutale de l’euro serait est peu probable étant donné la force commerciale de l'Allemagne et les politiques bellicistes de la Banque centrale européenne. La voie allemande - avec des réformes visant à accroître la productivité et contenir la hausse des salaires - ne fonctionnera pas non plus. Rapidement, ces réformes ont en fait tendance à réduire la croissance et il a fallu plus d'une décennie à l'Allemagne pour rétablir sa compétitivité, un horizon qui est beaucoup trop long pour les économies de la périphérie qui ont un besoin urgent de croissance. La déflation est une troisième option, mais celle-ci est aussi associée à une récession persistante. L’Argentine a emprunté cette voie, mais après trois ans d'une récession encore plus forte, elle abandonna et décida de ne pas honorer se engagements et de sortir sa monnaie du système de change fixe. Même si la déflation était atteinte, l'effet sur le bilan augmenterait la charge réelle des dettes publiques et privées. Tous les discours de la BCE et de l'Union européenne sur une dépréciation interne sont une erreur, la nécessaire austérité budgétaire ayant encore - à court terme - un effet négatif sur la croissance Ainsi, étant donné ces trois options peu probables, il n'y a vraiment qu'une seule autre façon de restaurer la compétitivité et la croissance à la périphérie : quitter l'euro, revenir aux monnaies nationales et parvenir à une dépréciation massive nominale et réelle. Après tout, dans toutes ces crises des marchés financiers émergents qui ont restauré la croissance, un passage à des taux de change flexibles a été nécessaire et inévitable pour les liquidités officielles, l'austérité et la réforme et, dans certains cas, la restructuration et la réduction de la dette et la réduction. Bien sûr, aujourd’hui l’idée de quitter l’euro est inconcevable, même à Athènes et Lisbonne. La sortie imposerait de grandes pertes sur les marchés financiers pour le reste de la zone Euro, par le biais de réelles dépréciations et de pertes de capital pour les créanciers, et ceux en grande partie dans la même direction que la « Pesification » Argentine (En Argentine, politique d'assainissement économique ayant visé à convertir en peso les dépôts en dollars, ndlr) de sa dette en dollars comme lors de la dernière crise. Pourtant les scénarios inconcevables aujourd’hui ne seront pas si farfelus que cela dans cinq ans, en particulier si certaines des économies périphériques stagnent. La zone euro a pu s'agglomérer grâce à la convergence de taux d’intérêts réels faibles pour soutenir la croissance, l’espoir que des reformes pourraient maintenir la convergence, et la perspective d’une éventuelle uniformisation fiscale et politique. Mais désormais la convergence a disparu, la réforme est au point mort, tout comme l’union politique et fiscale n’est plus qu’une utopie lointaine. Les restructurations de dettes se produiront. La question est quand (bientôt ou plus tard) et comment (de manière ordonnée ou non). Mais même la réduction de la dette ne sera pas suffisante pour retrouver la compétitivité et la croissance. Pourtant, si cela ne peut pas être atteint, la solution de quitter l'union monétaire va devenir prégnante : les avantages d'y rester seront plus faibles que ceux d'en sortir, quoique cette sortie se révèle agitée ou chaotique. Nouriel Roubini *Nouriel Roubini est Président de la Roubini Global Economic, professeur d’économie à la Stern School of Business NYU et co-auteur de « Crises Economiques », récemment publiée en édition de poche. Financial Times, 14 juin 2011, (Traduit par nos soins) http://www.businessspectator.com.au/bs.nsf/Article/eurozone-debt-crisis-EU-default-defaltion-interest-pd20110614-HSVZZ?opendocument&src=rss *************************************************
Pour mémoire
« L'euro une imposture idéologique... S'il fallait sacrifier le franc pour un bien supérieur, je m'y plierais. Mais ce qui s'annonce est très dangereux. Au lieu de nous guérir, l'euro va aggraver le mal. Nous allons vers une crise encore plus profonde. L'Euroland est dirigé par des banquiers. Un pays abstrait avec une monnaie abstraite. Dans l'histoire, jamais une monnaie unique durable n'a existé sans être adossée à un Etat. On le voit déjà, l'euro est une monnaie génétiquement faible, dont la valeur est subordonnée au billet vert. C'est un dollar CFA...
Surtout, je n'accepte pas d'être considéré comme xénophobe et anti-européen. Je suis contre cette monnaie unique parce que je suis profondément européen. L'euro va tuer l'Europe »
Philippe de Villiers, "Vous avez aimé les farines animales, vous adorerez l'euro" (Albin Michel, 2001)
Mardi 14 Juin 2011, L'Observatoire De l'Europe
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