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Plutôt l’activisme que la mollesse
02/03/2011 09:37
Intervention de Jean-Pierre Chevènement au Sénat sur le projet de loi « Lutte contre la prolifération des armes de destruction massive et de leurs vecteurs », mardi 1er mars 2011.
Monsieur le ministre,
L’adoption du présent projet de loi mettra enfin la France en conformité avec les obligations qui découlent de la résolution 1540 adoptée le 28 aout 2004 par le Conseil de sécurité des Nations Unies (CSNU).
On peut se demander pourquoi il aura fallu près de sept ans à la France pour réaliser cette mise en conformité, alors que dès la chute du régime taliban, en 2001, les services de renseignement américains faisaient savoir l’intérêt d’Al Quaida pour recueillir les éléments nécessaires à la confection d’une arme nucléaire.
C’est en 2003, après l’arraisonnement dans les eaux italiennes du cargo allemand BBC China transportant des centrifugeuses, que la Libye avait révélé les activités du réseau semi-privé du docteur Abdal-Quader-Khan pour approvisionner ses commanditaires à travers de multiples ramifications, en matière nucléaires, équipements, modes d’emploi permettant la réalisation, in fine, d’une arme nucléaire.
Dès mai 2003, le Président Bush avait lancé une initiative de sécurité contre la prolifération dite PSI, coalition fonctionnelle regroupant 90 Etats autour d’un noyau dur de 20 pays.
Cette initiative visait à la mise en commun des moyens de contrôle et de surveillance des trafics de composants d’AMD et de leurs vecteurs.
La résolution 1540 du CSNU, sans mentionner cette initiative, est venue la codifier, au moins partiellement. Cette résolution prescrit aux Etats de se doter d’une législation réprimant les activités d’acteurs non étatiques en matière de prolifération d’AMD et de leurs vecteurs, de mettre en place des dispositifs intérieurs de contrôle –comptabilisation-, protection physique, contrôle aux frontières et d’agir avec l’aval de leurs activités judiciaires et dans le respect du droit international.
L’Union européenne avait adopté, en 2003, une stratégie européenne de non prolifération, complétée en 2008, sous présidence française, d’un plan d’action contre la prolifération des armes nucléaires, radiologiques et chimiques. Enfin on ne compte plus les nombreuses initiatives internationales dont les principales sont :
- Le partenariat mondial du G8 de juin 2002 au sommet de Kananaskis
- La « global Threat Reduction Initiative » GTRI, lancée en 2004 par les Etats-Unis en liaison avec l’AIEA dont le fonds de sécurité nucléaire est alimenté par les contributions volontaires des Etats
- La « global Initiative to combat the nuclear terrorism » (GICNT) a été prise en 2006 par les Présidents Bush et Poutine.
- Dans son discours de Prague, le 5 avril 2009, le Président Obama a qualifié la menace de terrorisme nucléaire comme étant « la plus immédiate et la plus extrême pour la sécurité du monde ».
- En avril 2010 un sommet mondial sur la sécurité nucléaire s’est tenu à Washington. Il a permis de ratifier la convention sur la protection physique des matières nucléaires et son amendement de 2005, de mettre l’accent sur le recensement des matières sensibles et d’encourager la minimisation des usages civils de l’uranium hautement enrichi.
On peut donc s’étonner du retard avec lequel ce projet de loi vient devant le Parlement.
Ce n’est qu’en novembre 2006 que le Premier Ministre a confié au Secrétaire général de la défense nationale le soin d’effectuer un diagnostic interministériel sur le l’ensemble de notre arsenal juridique en matière de lutte contre la prolifération des AMD et de leurs vecteurs.
Enfin mieux vaut tard que jamais ! Notre législation actuelle résulte de l’empilement de strates successives de 1972 à 2010.
Il est bon d’harmoniser les dispositions régissant les trois domaines nucléaire, biologique et chimique, en aggravant notamment les peines frappant les activités menées en bande organisée, afin de lutter contre le développement des réseaux, ainsi que le financement des actes contribuant à la prolifération. Il était également nécessaire de renforcer et d’élargir le dispositif répressif lié à la prolifération.
On ne peut que se réjouir enfin de la centralisation des poursuites et des jugements au TGI de Paris sur le modèle éprouvé de la législation antiterroriste.
L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité le 25 novembre 2010 le projet de loi et votre commission des Affaires étrangères, de la défense et des forces armées vous propose d’en faire autant.
Je me bornerai donc à faire quelques observations :
1- Ce projet de loi sera utile, notamment en ce qu’il définira un modèle pour d’autres pays dans un domaine dont on ne saurait sous-estimer l’importance stratégique.
2- On ne doit cependant pas se dissimuler que la plupart des trafics se déroulent hors du territoire national. L’adoption de la loi doit donc être relayée par une intense activité de coopération internationale en matière de renseignements et en tous domaines, policier, douanier, fiscal, maritime, aérien…
3- On peut s’étonner de deux omissions :
a- le texte du projet de loi ne vise pas la confection de bombes radiologiques dites encore bombes sales, dont le risque paraît plus élevé que celui de la fabrication ou du vol d’une arme nucléaire proprement dite, dont la mise en œuvre par un vecteur approprié ne va pas de soi. Notre rapporteur, M. André Dulait, nous indique que le gouvernement préparerait un projet de loi sur la protection des sources radioactives. Je souhaite que vous nous le confirmiez et que vous nous indiquiez le délai nécessaire au dépôt de ce projet de loi sur le bureau des Assemblées.
b- De même aucune disposition n’est prévue pour faire face aux attaques éventuelles dans le cyberespace. Ne serait-il pas temps là aussi de demander au SGDN de faire des propositions ?
4- Enfin l’intérêt apporté à la lutte contre la prolifération émanant d’acteurs non étatiques ne doit pas nous détourner de la lutte contre la prolifération d’origine étatique, tant il est vrai que les trafics illicites se nourrissent des comportements proliférants d’Etats n’ayant pas souscrit au TNP ou à d’autres instruments juridiques internationaux ou ne se conformant pas à leurs obligations.
a- Ainsi trente trois Etats n’ont toujours pas ratifié la convention d’interdiction des armes biologiques et sept ne sont pas parties à la convention d’interdiction des armes chimiques. Dans les deux cas, il y a la Syrie, l’Egypte et Israël. La Convention d’interdiction des armes biologiques souffre de l’absence d’un mécanisme d’inspection et de vérification. Quelles initiatives comptez-vous prendre pour y remédier ?
b- Enfin la prolifération balistique ne peut être enrayée à travers le régime de contrôle de technologie des missiles MTCR créé en 1987 ni par le Code de conduite de La Haye de novembre 2002 qui n’est pas contraignant.
c- Notons enfin que le projet de traité dit « cut off » interdisant la production de matières fissiles à usage militaire est en panne du fait du veto pakistanais à la Conférence du Désarmement et du refus par la Chine de tout moratoire sur la production de ces matières. Quelles initiatives le gouvernement français compte-t-il prendre dans ce domaine qui fonde la crédibilité de la lutte contre cette prolifération ?
d- Notons enfin que l’Administration américaine ne semble pas en mesure de faire ratifier le traité d’interdiction des essais nucléaires par le Sénat américain, faute de la majorité des deux tiers nécessaire à cet effet.
La lutte contre la prolifération est un tout. On aimerait que le gouvernement nous donne une vue d’ensemble de la manière dont il voit l’application des résolutions de la Conférence d’examen du TNP de mai 2010. Dans ces domaines complexes la vigilance ne doit jamais se relâcher. Il vaudrait mieux que le gouvernement soit critiqué pour son activisme que pour sa mollesse.
Sous ces réserves, le groupe RDSE votera le projet de loi.
http://www.chevenement.fr/Plutot-l-activisme-que-la-mollesse_a1089.html
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Immigration: Marine Le Pen, la rechute ?
02/03/2011 09:32
Invitée mardi 1er mars de Jean-Michel Aphatie, Marine Le Pen a réitéré son souhait de repousser dans les eaux internationales les migrants venus des pays arabes. Intronisée mi-janvier, la présidente frontiste aura donc mis moins de 2 mois avant de renouer avec un discours anti-immigration digne du FN des années 80.
(Marine Le Pen - capture d'écran - Dailymotion - rtl-fr)
Depuis que Le Pen fille a repris le Front national des mains de Le Pen père, elle s’échine à recouvrir le parti d’extrême-droite d’un voile de blancheur prétendument républicaine. En inaugurant son mandat le 16 janvier à Tours par une ode à l’Etat « composante essentielle de l'âme de la France », Marine Le Pen espère sans doute se draper dans des atours un peu plus décents pour la présidente d’un parti crédité par les derniers sondages de 19 à 20% d’intentions de votes.
La capacité de Marine Le Pen à se démarquer de son paternel vient pourtant de connaître un coup d’arrêt lors de sa visite au salon de l’agriculture le vendredi 25 février. Interrogée sur les flux migratoires liés aux révoltes dans le monde arabe, la candidate FN a déclaré : « L’union européenne est totalement impuissante à nous protéger, il faut passer un accord bilatéral avec l’Espagne et l'Italie pour permettre à nos marines de préserver nos eaux territoriales et repousser dans les eaux internationales les migrants qui voudraient entrer en Europe. » Marine Le Pen amorce-t-elle un virage républicain ? La question était sur toutes les lèvres au lendemain du congrès de Tours. Avec cette sortie, la voilà qui opère une incontestable régression en renouant avec les vieilles lunes du Front des années Jean-Marie. Attendue sur l’immigration, thème de prédilection et fonds de commerce du FN, la présidente a plongé tête la première dans le débat, sans même se donner la peine de distinguer l’immigration traditionnelle des flux migratoires exceptionnels dus à des crises politiques majeures.
Invitée ce mardi 1er mars de RTL, la nouvelle présidente du Front enfonce le clou : « On peut parfaitement repousser des bateaux dans les eaux internationales humainement ». Malgré les protestations de Jean-Michel Aphatie, elle ajoute : « Je crois qu’on va dire que je suis la seule à avoir le courage de prendre les décisions nécessaires pour sauvegarder l’intérêt de la France et des Français. Il n’y a rien de plus facile que de faire du compassionnel mais y a toujours quelqu’un qui paye le prix et ce sont les Français qui le payent. »
En l'écoutant ce matin sur RTL, Bruno Gollnisch a dû sourire devant sa glace : si Marine Le Pen retombe dans une rhétorique anti-immigrés façon années 1980, c'est peut-être que son positionnement demeure incompris dans les tréfonds du Front national, et qu'elle entend rectifier le tir.
Laureline Dupont - Marianne
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Les vacances de Monsieur Guaino
02/03/2011 09:28
Les Inrocks, Canard Enchaîné du pauvre
On pourrait appeler ça du journalisme d’inquisition. Mais heureusement, c’est une inquisition au petit pied dont le ridicule limite la capacité de nuisance. Il y a quelques années, pour être un grand journaliste, il fallait sortir des « affaires ». C’était souvent pénible et dégoûtant, mais il arrivait que les malheureux cloués au pilori médiatique eussent réellement commis des indélicatesses et confondu pour de bon les caisses de l’Etat avec celles de leur parti, voire avec leurs propres poches. Rivalisant pour épingler les plus puissants à leur tableau de chasse, les investigateurs prenaient des mines de conspirateurs pour aller déjeuner avec des juges ou des flics, mais au détour de leurs croisades pour le Bien, ils ont aussi révélé de vraies affaires d’Etat devenues impossible à camoufler sous le manteau de la raison du même nom.
Le nouveau feuilleton que nous offre le journalisme satirique, subversif et résistant donne la mesure de la décadence du métier. Désormais, pour faire trembler les tyrans qui nous oppriment, plus besoin de se casser la tête à remonter le cours de sombres transactions financières, ni même d’avoir la chance de se trouver à proximité quand ils lâchent une blague de fin de banquet. Non, il suffit de leur poser la question qui tue : « tu vas nous le dire, où t’as passé tes vacances ! ».
D’accord, ne mélangeons pas tout : l’escapade tunisienne de Madame Alliot-Marie était bel et bien une faute politique. Fillon en Egypte, c’était déjà beaucoup de bruit pour rien. Mais avec les vacances de monsieur Guaino, les Inrocks sombrent dans le grotesque, avec, en prime, une pointe de vraie dégueulasserie.
Je précise, pour ceux qui l’ignorent, qu’Henri Guaino est un ami. Enfin, un peu moins depuis que j’ai découvert qu’il a refilé ce scoop à la concurrence. Imaginez : la plume du président a passé ses vacances de Noël à Tripoli où il était reçu par son ami François Gouyette, ambassadeur de France en Lybie ! Il faudra d’ailleurs songer à dresser la liste des diplomates qui ont séjourné dans des pays non-démocratiques. Ennemis des peuples !
Donc, un journaliste frétillant appelle Guaino et, tel un flic qui braquerait sa lampe sur le visage d’un dur à cuire, le somme d’avouer. Au passage, il enregistre la conversation en loucedé : sans doute pense-t-il que ça lui donne le chic-espion. En tout cas, chapeau la déontologie ! Les propos de Guaino sont reproduits in extenso sur le site. Pour ceux qui n’auraient pas compris que les Inrocks jouent dans la cour des grands, le papier est annoncé à grands coups de trompette sous le titre affriolant « Le réveillon lybien d’Henri Guaino ». Du vrai SAS. « Et de trois ! », claironne le chapeau. Après MAM et Fillon, j’en tiens un autre chef ! Guaino chez Gouyette, ça, c’est du lourd !
Connaissant son caractère placide, je trouve surprenant et même un peu désolant que le « Conseiller spécial », tout en ironisant, ait répondu au journaliste au lieu de l’envoyer au diable. Peut-être s’est-il dit, dans un accès de sagesse, qu’il avait mieux à faire que nourrir une polémique idiote. Admettons qu’il a bien fait, même si j’attends avec impatience le jour où un politique osera remettre à sa place un de ces flics habillés en journaliste.
Si j’avais du temps à perdre, j’écrirais un livre sur les vacances des journalistes. Dites-donc, vous, vous n’étiez pas à Cuba, l’été dernier ? Ou au Vietnam ? Et votre week-end à Saint Petersbourg, vous n’avez pas honte, avec toutes les turpitudes de Poutine ? Pas bien propre tout ça. Sinon, pour ramener mes confrères à la raison, j’ai une petite idée : les obliger, chaque fois qu’un ministre ou un élu revient de vacances, à se farcir le récit détaillé avec séance de diapos.
Reste, tout de même, une petite raison de croire dans le journalisme de mon pays : la mayonnaise n’a pas vraiment pris. Certes, cette information de haute importance a donné lieu à deux dépêches avant d’être ânonnée par quelques confrères en mal de sensations. Mais je crois qu’il n’y aura pas d’affaire Guaino. Dommage pour les Inrocks qui voulaient se la jouer « Wahington Post façon Watergate » et n’ont réussi qu’à être le Canard Enchaîné du pauvre.
Elisabeth Lévy
http://www.causeur.fr/les-vacances-de-monsieur-guaino,8829
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Juppé super-star: les médias ont la mémoire qui flanche
02/03/2011 09:24
Les médias ont réussi le tour de force de faire passer Alain Juppé, habitué des hautes sphères du pouvoir, pour une quasi révélation politique. Jack Dion rappelle que le consensus réuni autour d'Alain Juppé - qui fut honni du temps où il était Premier ministre - n'est peut-être qu'un signe de plus de la décrépitude du pouvoir sarkozyste.
A en croire ce qui s’écrit dans les gazettes, la révélation politique de l’année s’appelle… Alain Juppé. Le Figaro l’a même catalogué du titre d’ « homme providentiel ». Un peu partout, on entend des hommages dithyrambiques et des commentaires flatteurs, comme si le nouveau ministre des Affaires étrangères avait, tout au long de sa (déjà longue) carrière, effectué un sans faute, ou qu’il incarnait une relève en forme de rupture fantasmatique. Certains vont même déjà jusqu’à le présenter comme une alternative éventuelle à un Sarkozy incapable de trouver un quelconque second souffle. Cette vision digne d’un conte pour enfants confirme simplement que les commentateurs n’ont pas de mémoire, à moins qu’ils ne réécrivent le passé afin d’occulter leurs propres turpitudes.
Nul ne doute que le maire de Bordeaux ait une stature qui fera oublier les frasques de ses prédécesseurs, qu’il s’agisse de Bernard Kouchner et de ses compromissions, ou de Michèle Alliot-Marie et de ses amitiés particulières en Tunisie. Juppé est déjà passé par la case Quai d’Orsay, et il y a fait montre d’un professionnalisme certain, à une époque où la France n’avait pas encore rejoint le camp atlantiste et faisait entendre une petite musique originale sur la scène internationale. Il y revient alors que Paris a réintégré la direction de l’Otan et brille par ses ratés diplomatiques, avec pour mission de rattraper une partie du temps et du terrain perdu. Vaste défi.
En attendant de juger le successeur de MAM aux actes, on peut au moins rappeler qu’il n’est pas vraiment un nouveau venu. Le maire de Bordeaux (et qui entend le rester, au nom du droit au cumul qui est l’une des tares de la caste politicienne) a même un passé qui devrait inciter ses laudateurs à un peu plus de circonspection. Passons sur l’ancien Premier ministre de Jacques Chirac, en 1995, empêtré dans une histoire de logement assez obscure, et qui disait : « Je suis droit dans mes bottes ». Oublions celui qui proposait, en 1996, de céder Thomson pour 1 franc symbolique au sud-coréen Daewo, en lançant à la télévision, geste à l’appui : « Thomson, ça ne vaut rien ! ». Laissons de côté l’affaire des emplois fictifs de la ville de Paris, où il a payé pour d’autres, curieusement oubliés par la justice. Retenons seulement le Juppé qui dut affronter un mouvement social massif en novembre/décembre 1995, et qui en est sortie par la porte de la déroute. Du 24 novembre au 15 décembre, Alain Juppé symbolisa une intransigeance totale, avant de retirer le plan qui portait son nom sur les retraites et la sécurité sociale, à la suite d’un mouvement massif.
A l’époque, Juppé personnifia des comportements que l’on retrouvera dans d’autres circonstances, notamment à l’occasion du référendum sur le projet de constitution européenne : l’arrogance des dominants, sûrs d’eux et dominateurs ; le mépris du peuple ; le refus de prendre en compte tout avis contraire et l’expression systématique d’une bien pensance considérée comme la Bible des temps modernes. Durant ce mouvement, il était de rigueur de dire au vulgum pecus qu’il n’y avait pas d’alternative – antienne reprise par tous les penseurs alors bien en cour, et qui le sont encore aujourd’hui (le monde des éditorialistes se renouvelle très peu). Face aux grévistes, aux syndicalistes et aux manifestants, de doctes esprits dénonçaient le « corporatisme » des opposants, incapables de comprendre qu’il n’y avait pas d’autres choix politiques possibles, et que le plan Juppé était forcément la bonne réponse puisque c’était la seule envisageable. On peut d’ailleurs penser que si le ministre des Affaires étrangères garde aujourd’hui une certaine notoriété médiatique, c’est parce qu’il disait tout haut ce que l’élite pensait tout bas. En vérité, un autre phénomène explique le retour en gloire de Juppé : la décrépitude avancée du sarkozysme. Du coup, des hommes que l’on croyait enterrés à jamais retrouvent des vertus insoupçonnées. C’est une ruse de l’histoire qui peut réserver d’autres surprises.
Jack Dion - Marianne
http://www.marianne2.fr/Juppe-super-star-les-medias-ont-la-memoire-qui-flanche_a203376.html
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Réponse à Malakine: la situation est aujourd’hui beaucoup moins désespérée qu’elle ne le paraissait le 18 juin 1940
02/03/2011 09:19
Malakine, sur son blog, m’invite à aller plus loin que mon livre : « La France est-elle finie ? » pour répondre à ses interrogations, ce que je vais essayer de faire. Elles sont pertinentes, tellement même qu’il m’arrive de me les formuler à moi-même.
Je souhaite auparavant dissiper quelques malentendus. J’ai beaucoup d’admiration pour les intuitions et les analyses souvent pénétrantes et toujours stimulantes d’Emmanuel Todd. Il me semble cependant que l’exigence républicaine telle que je l’ai définie permet de dépasser l’opposition entre la « culture individualiste » et la « culture souche ». Je ne méconnais pas le temps long de l’Histoire qui ferait rouler chaque peuple indéfiniment dans son ornière. J’ai constaté depuis longtemps qu’il fallait un projet pour rassembler les Français. Je n’ironise pas, comme le croit Malakine, sur l’universalisme. Je crois avoir écrit que la République était universelle, à condition d’être pensée dans au moins trois dimensions : « l’intérêt national à long terme ne peut s’opposer à l’intérêt européen et celui-ci ne peut se définir dans l’oubli des intérêts généraux de l’Humanité » (p. 295). Je réserve donc ma douce ironie à l’illusion répandue chez les Français que leur culture est celle de l’Univers, ce qui les rend insensibles à l’existence d’autres cultures. Je ne crois donc pas professer « une conception holiste de la nation ». Les « valeurs de transmission » sont, pour l’essentiel, des valeurs d’éducation : les vrais républicains révèrent l’Ecole. La République est d’abord « enseignante ». S’identifiant à la fois à un projet et à la France, la République « modèle Valmy », est plus forte que tous les « holismes ». Voilà, je l’espère, dissipés quelques malentendus.
Peut-être (et même sûrement) n’ai-je pas bien compris l’anthropologie « toddienne ». Il faut que je m’y remette ! Mais pas plus que moi, Emmanuel Todd ne me semble croire à une « refondation à zéro » de l’Humanité et encore moins en la possibilité d’une rupture totale en l’Histoire (p. 244).
Pour ma part, je crois en la « volonté de raison » et à la supériorité de la conscience sur l’inconscience de la simple Tradition. C’est ma définition de la République comme recherche d’un intérêt général donc collectif, au-dessus des intérêts individuels ou catégoriels. On peut trouver cette démarche idéaliste. Mais elle ne m’a jamais empêché de voir que la France a préexisté à la Révolution et à la République, et que même la France les a rendues possibles. La République est le nom moderne de la France. Elle intègre la devise républicaine à son patrimoine « toddien », si je puis dire. Il me semble que les « grands républicains » ont très bien compris cette filiation, de Gambetta à De Gaulle, en passant par Ferry, Clemenceau, et Jaurès qu’il ne faut pas oublier.
La question de l’Ancien Régime et de la Révolution est aujourd’hui dépassée. Ce qu’il faut comprendre c’est l’affaissement de la République depuis l’entre-deux guerres jusqu’à aujourd’hui. Il faut relire autrement notre XXe siècle pour pouvoir entrer dans le XXIe.
Mon livre est donc fondamentalement optimiste, car il vise à restaurer chez les Français l’estime de soi et par conséquent la confiance et l’élan qui leur manquent aujourd’hui pour construire leur avenir. J’ai essayé de montrer que dans le grand choc des idéologies nées de la « barbarisation » (Hobsbawm) de la Première Guerre mondiale (le communisme et le fascisme), la France avait quand même des excuses pour s’être « évanouie » (au propre comme au figuré) en mai-juin 1940. René Girard a sans doute eu raison d’écrire qu’on ne peut pas « faire deux fois Verdun », surtout pour un peuple aussi démographiquement épuisé que l’était le peuple français dans les années trente.
De Gaulle a symbolisé le 18 juin, « l’intérêt général » au sens le plus élevé (celui de la France mais aussi celui de la liberté dans le monde, comme il l’affirme explicitement dans son discours du 22 juin), intérêt général tellement héroïque qu’il a fallu quelque temps à la majorité des Français pour s’en rapprocher. Mais n’oublions pas que le discours de Pétain sur le « vent mauvais » qu’il sent se lever sur la France (c’est-à-dire l’esprit de résistance) date de mai 1941, un mois avant l’invasion de l’Union Soviétique par les nazis. Le peuple français, certes prostré après la défaite, n’a jamais été collaborationniste, n’en déplaise à ses contempteurs qui veulent en faire les complices du génocide (voir le honteux procès fait à la SNCF).
Il faut aujourd’hui relever la République, c’est-à-dire la France. La crise de l’européisme (c’est-à-dire la confusion de l’Europe à la fois avec la « méthode communautaire » inventée par Jean Monnet et avec le néolibéralisme aujourd’hui en crise), en offre l’occasion. La France est certes un pays individualiste mais elle n’est pas le seul au monde : les Etats-Unis aussi sont un pays individualiste. Mais il n’est pas fatal que l’individualisme submerge le sens du collectif, c’est-à-dire le patriotisme, au bon sens du terme. J’observe que les socialistes eux-mêmes, tout en continuant à m’ostraciser, moi et mes amis, sous prétexte que nos idées seraient « réactionnaires » (ce qui leur évite d’avoir à les discuter), ont réappris à invoquer « l’intérêt général », certes du bout des lèvres, et sans toujours en bien comprendre la signification. Mais la prière, selon Pacal, ne finit-elle pas par engendrer la foi ?
Je ne méconnais nullement, comme semble le croire Malakine, l’état calamiteux de l’esprit public actuel. S’il fallait en rester aux catégories de « droite » et de « gauche », passablement usées par l’usage qui en a été fait, on pourrait spéculer sur les capacités respectives de la gauche à se réapproprier la République et la France (c’est-à-dire le patriotisme), et de la droite à mettre de son côté le civisme et le sens de l’Etat. Ne rêvons pas : seuls de grands évènements pourraient ouvrir l’ère de ces grandes redécouvertes. Mais ces évènements ne sont-ils pas devant nous ?
Contrairement à vous, cher Malakine, je ne crois pas que l’Allemagne puisse persévérer dans son « cavalier seul » pour les quatre raisons que j’ai énoncées dans mon livre (p. 229). L’idée du « schisme européen » (à l’Allemagne le Nord de l’Europe, à la France le Sud), me paraît contraire à la vocation même de notre pays dont le nom est germanique, même si la langue est latine.
Ce que vous dites sur « ces élites qui se vivent comme appartenant à une oligarchie mondiale » me fait penser à un livre écrit en 1994 par Christopher Lasch, intitulé La révolte des élites. C’était et c’est une vérité d’observation : aux Etats-Unis comme en France. Obama en prônant la réindustrialisation des Etats-Unis a à peine commencé à remettre les pendules à l’heure …
Revenons à la France : celle-ci ne sera finie que si les Français y consentent. Tel ne me paraît pas être fondamentalement leur état d’esprit (voir la victoire du « non » au référendum du 29 mai 2005). Souvenons-nous de Kant qui dit que la République est une idée si forte que même temporairement vaincue, il est impossible qu’elle ne puisse réapparaître un jour à la faveur de circonstances favorables.
Dans une génération d’ici, la France sera aussi peuplée que l’Allemagne. Le moment viendra où nous pourrons concevoir l’avenir à égalité. Il était sans doute trop tôt pour définir plus précisément dans mon livre, les contours exacts de ce « projet républicain » de redressement de l’Europe. Mais pensez-vous, cher Malakine, que la situation aujourd’hui soit beaucoup plus désespérée qu’elle ne le paraissait le 18 juin 1940 ?
Jean Pierre Chevènement
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