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Impôts: Sarkozy se coupe des classes moyennes
24/02/2011 09:48
La question fiscale - qui devrait occuper une place centrale dans la campagne de 2012 - s'annonce compliquée pour le très probable candidat à sa propre succession. Pour Roland Hureaux, il sera difficile de convaincre les classes moyennes, qui s'estiment lésées par une politique fiscale surtout favorable aux couches les plus aisées.
omment ne pas s’étonner que le président de la République, qui passe pour un grand stratège, mette en chantier dans une année pré-électorale, un sujet aussi périlleux que la réforme fiscale ? Sans doute, ne sait-il pas que la difficulté de réformer les contributions fut à l’origine directe de la Révolution française ?
On peut sommairement diviser la population française, et même l’ensemble des sociétés occidentales aujourd’hui, en trois segments :
- au sommet de l’échelle, le 1% de revenus très élevés, qui ont le plus souvent aussi la plus grande fortune ; peut-être faudrait-il même réduire ce pourcentage à 0,5 %; - au bas de l’échelle, entre 10 et 15 % d’ « exclus » vivant d’aides sociales (RSA, CMU, Minimum vieillesse, allocations de chômage, AAH etc.) et une frange de travailleurs à temps partiel; - entre les deux, une vaste « classe moyenne » qui va du pharmacien et du patron de PME à ce qu’on appelait autrefois la classe ouvrière : travailleurs au SMIC ou un peu au-dessus du SMIC; Cette catégorie centrale n’est assurément pas entièrement homogène (il y a assurément une grande distance entre les commerçants les plus prospères et les ouvriers ou employés les plus modestes). Mais elle se définit par le fait qu’elle gagne sa vie en travaillant : le petit patron a beau avoir un capital, il est d’abord un travailleur, et par le fait qu'elle paye des impôts et qu’elle a même le sentiment de porter le poids de l’essentiel de la charge fiscale, alors que les deux autres catégories, dans des registres évidemment très différents, ne vivent pas d’abord de leur travail.
Même si les dirigeants de grands groupes, les sportifs et les artistes, les traders les plus doués, qui appartiennent au premier groupe, travaillent, leurs revenus sont hors de proportion avec le travail qu’ils fournissent. Ils payent sans doute beaucoup d’impôts mais, bien conseillés et quelquefois « délocalisés », il s’en faut de beaucoup qu’ils subissent comme les classes moyennes supérieures le choc de la progressivité. Le cas de l’héritière Bettencourt imposée à 22 % de son revenu est significatif. Quant au troisième groupe, il ne travaille pas non plus, volontairement ou pas, et se trouve exonéré de la plupart des impôts directs. Le candidat Sarkozy a fait d’abord campagne auprès du groupe central, « ceux qui se lèvent tôt » ; en répétant à satiété qu’il fallait « travailler plus pour gagner plus », il épousait entièrement les valeurs de ce groupe : fierté du travail, hostilité à l’impôt, et à des degrés variables, hostilité aux abus de l’Etat providence, cela avec des nuances : l’hostilité au « tout-social » va croissante à mesure qu’on descend vers le bas de l’échelle ; elle atteint son maximum chez les « travailleurs pauvres » qui constatent presque tous qu’une situation d’assistance bien gérée rapporte autant ou plus que ce qu’ils gagnent en travaillant. Le milieu et le haut de la classe moyenne a moins ce souci, d’abord parce que sa situation est plus confortable et que la vie quotidienne ne lui offre pas tant d’occasions de faire de comparaisons. L’hostilité des classes moyennes à la première strate, qui devrait être grande, est largement amortie par la discrétion de celle-ci : les vrais riches, souvent très âgés, ne font en général pas de bruit. Cette hostilité ne s‘éveille qu’à l’annonce des salaires et des bonus des grandes banques et de leurs traders ou des cachets des joueurs de football. Si le bas de la classe moyenne, la classe ouvrière ou paysanne, en veut surtout aux assistés, le haut de la classe moyenne en veut à l’Etat. Plus le système fiscal est lourd, plus ses chances d’atteindre le haut de l’échelle, de rejoindre la vraie fortune, sont faibles. Comme dans le Bas-Empire romain, la lourdeur de la fiscalité rigidifie les classes sociales, ralentit la mobilité sociale ascendante (réservée à quelques grands fauves des affaires ou vedettes de la chanson au destin exceptionnel), ce qui ne va pas sans frustrations dans toute une partie de la classe moyenne. Bien qu’il ait fait surtout campagne auprès du groupe central, Nicolas Sarkozy a, on le sait, fait essentiellement la politique du premier groupe, celui des très riches – et à la marge du troisième. Non seulement, il n’a pas répondu à la frustration des classes moyennes, mais il a aggravé leur situation. Elles se sentent de plus en plus imposées alors que la classe supérieure mondialisée l’est de moins en moins, et que la classe inférieure continue de vivre de la solidarité nationale, et donc à ses dépens.
Les réformes emblématiques du début du quinquennat: abaissement du bouclier fiscal, allègement de l’ISF bénéficient principalement au premier groupe. En revanche, l’évolution des tranches de l’impôt sur le revenu, l’extension quasi-universelle de la CSG et d’autres mesures analogues donnent à toute une partie des classes moyennes et même à une partie des travailleurs modestes, le sentiment de payer plus d’impôts depuis 2007.
Emblématique fut l’institution du RSA qui s’est traduite par un transfert d’1,5 milliard supplémentaire en faveur des exclus – transfert d’une utilité douteuse selon un économiste de gauche comme Michel Godet –, entièrement mis à la charge de catégories moyennes et moyennes inférieures par l’alourdissement de la fiscalité de l’épargne, les plus riches se trouvant exonérés de cette solidarité grâce au bouclier fiscal. L’évolution fiscale renforce ainsi celle de revenus primaires qui, dans tous les pays, a vu les 1% les plus riches progresser d’environ 30 % au cours de la décennie 2000-2010, tandis que le revenu des 99% autres, singulièrement des classes moyennes, stagnait ou régressait. Ce mouvement, exacerbé aux Etats-Unis – au bénéfice non point des 1 % mais des 0,1 % les plus fortunés, se voit aussi dans toute l’Europe continentale, France comprise. Le projet de réforme fiscale est ainsi pris entre deux feux : - d’un côté les classes moyennes ressentent vivement un malaise du fait de promesses qui ne sont pas tenues ; - de l’autre le président ne veut pas finir son mandat sans tenir jusqu’au bout la promesse qu’il a faite à ses amis du Fouquet’s, très représentatifs de la première catégorie : non seulement le bouclier fiscal mais la suppression complète de l’ISF.
Le seul moyen de satisfaire en même temps les uns et les autres, serait de réduire la pression fiscale. Or aucune des conditions pour ce faire n’est aujourd’hui remplie, au contraire : Il aurait fallu réduire les dépenses publiques, mais on est à cet égard loin du compte : les collectivités locales ont toujours la bride sur le cou pour augmenter les impôts locaux, qui pèsent le plus lourdement sur les classes moyennes, notamment l’impôt foncier ; la RGPP a induit toute une série de dépenses supplémentaires que personne ne s’est soucié de contrôler : hausse massive des traitements des hauts fonctionnaires sous prétexte d’introduire la rémunération au mérite, désordre mis dans l’administration par des réformes de structure brouillonnes. Il est clair que dans ces trois années 2007-2010, rarement l’Etat français aura autant démontré son incapacité à réduire ses coûts ; Dans une situation de croissance, la matière imposable se développant, il est possible de réduire les taux des impôts sans réduire leur rapport ; or la crise a entrainé un rétrécissement de la matière imposable qui limite considérablement la marge de manœuvre. Les deux dernières périodes de croissance où il eut été possible de réduire la pression fiscale: sous Rocard et sous Jospin, furent des occasions manquées : non seulement on ne l’a pas fait, mais on a alors utilisé la « cagnotte » pour engager des dépenses de fonctionnement pérennes. Enfin l’acquiescement, discutable en lui-même, de Nicolas Sarkozy à la politique d’austérité promue par Angela Merkel va l’obliger à réduire fortement le déficit et, comme les dépenses ne diminuent pas rapidement, d’augmenter encore la pression fiscale. Paradoxe étonnant : Sarkozy veut inscrire l’équilibre budgétaire dans la constitution alors que tout le reste de sa politique rend cet équilibre à peu près impossible.
La conséquence est claire : en l’absence de perspective de réduction du prélèvement total, si le président supprime l’ISF – qui représente près de 6 milliards d’euros, il va nécessairement accroître encore la pression fiscale sur « ceux qui se lèvent tôt », soit la plus grande partie des classes moyennes, le troisième tiers étant hors course. Typique de ce transfert de charges est la proposition d’un expert fiscal parisien formulée récemment dans le Figaro : remplacer l’ISF par une augmentation uniforme de l’impôt foncier. Rarement on vit proposition aussi légère ! Ce personnage ignore sans doute que dans une bonne moitié de la France (qui ne comprend ni Paris, ni Neuilly), l’impôt foncier est déjà écrasant ; il équivaut même dans certaines villes à un vrai loyer. Des petits propriétaires vendent leurs biens durement acquis car, la retraite venue, ils ne peuvent plus faire face aux charges. C’est la rançon de la licence accordée aux collectivités locales de dépenser sans compter. La taxe d’habitation est à l’avenant, à ceci près que la troisième strate en est généralement exonérée et quelle repose donc d’abord, elle aussi, sur les propriétaires. C’est pourquoi l’équation de la réforme fiscale posée par Sarkozy est insoluble. C’est la quadrature du cercle : il ne pourra, comme il le souhaite, alléger encore les impôts de ceux qui, de fait, gagnent déjà de plus en plus, sans alourdir les impôts de ceux dont les revenus stagnent ou baissent. Une cote mal taillée, telle qu’elle est envisagée par une partie de la majorité, se traduisant par de simples aménagements, risque de mécontenter tout le monde. Fin politique malgré tout, le président a compris que, tant qu’à faire les mécontents, il valait mieux faire des choix clairs : contre les atermoiements de sa majorité, il préconise la suppression pure et simple de l’ISF. Les classes moyennes n’y retrouveront pas leur compte. Mais les 1 % du haut de l’échelle, eux, s’y retrouveront et seront encore mieux fidélisés et, comme ils contrôlent la plupart des moyens de communication, ils seront d’autant plus motivés pour faire la campagne du président sortant. C’est sans doute là le calcul que fait le président.
Mais ce calcul demeure éminemment risqué. Chirac avait sans doute perdu les élections de 1988 sur une annonce trop claironnée de la suppression de ce qu’on appelait alors l’IGF (impôt sur les grandes fortunes). Cette annonce était venue en tout début de mandat : les vieux routiers de la politique disent que l’opinion ne retient que ce qui se fait dans le premiers mois et dans les derniers. La mesure emblématique des premiers mois de la mandature Sarkozy fut la baisse du boulier fiscal ; si la mesure emblématique des ses derniers mois est la suppression de l’ISF, sa réélection est bien compromise.
Roland Hureaux - Chroniqueur associé
image : (Flickr - World Economic Forum - cc)
http://www.marianne2.fr/Impots-Sarkozy-se-coupe-des-classes-moyennes_a203124.html
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Mexique : 50 universitaires interpellent Sarkozy
24/02/2011 09:44
Le fiasco diplomatique entre la France et le Mexique provoqué par l'intervention du Président de la République en réaction au refus d'extrader Florence Cassez, fait des vagues dans les milieux intellectuels concernés par les relations franco-mexicaines. Marianne2 publie la lettre ouverte qui circule actuellement dans les facs et les centres de recherche.
En réaction à la malheureuse « Affaire Florence Cassez », condamnée à 60 ans de détention dans une geôle mexicaine, le ton est monté rapido et crescendo entre Paris et Mexico, au mépris de tous les usages de la diplomatie. Ce fiasco, qui a fait par ricochet une victime collatérale - l’Année du Mexique - menace en outre sévèrement les chances de Florence Cassez de purger un jour sa peine en France. Voici le texte d’une lettre ouverte, rédigée par plusieurs dizaines d’universitaires français spécialistes du Mexique, en réaction à la décision du président de la République française de dédier l'Année du Mexique à Florence Cassez. Ce texte, qui circule largement dans les milieux académiques français, continue à recueillir des signatures.
Lettre ouverte à Nicolas Sarkozy
La décision de la justice mexicaine concernant le jugement de Florence Cassez a déclenché depuis quelques jours en France une série de réactions de la part du gouvernement, des partis politiques et des médias qui viennent d’aboutir à un énorme fiasco. Nous avons assisté à une montée en puissance de prises de position, depuis la déclaration de la ministre des Affaires étrangères refusant de participer aux manifestations prévues pour l’Année du Mexique en France et l’appel de Martine Aubry demandant aux collectivités locales socialistes de boycotter ces mêmes manifestations et d’annuler celles qui dépendent d’elles. Le 14 février, en dédiant l’année du Mexique en France à Florence Cassez, Nicolas Sarkozy a pris une lourde responsabilité. On ne peut demander à des artistes, des écrivains et des scientifiques français, aussi bien que mexicains, d’accepter d’être utilisés comme moyen de pression dans des affaires qui relèvent de la justice et de la diplomatie. Ce n’est pas acceptable pour nous français, pas plus que pour nos collègues mexicains. C’est un mélange des genres inadmissible qui a débouché sur la décision, logique, du gouvernement mexicain de se retirer.
L'année du Mexique est un événement destiné à mieux faire connaître ce pays. En aucun cas, elle ne peut être instrumentalisée par les gouvernements comme moyen de pression sur une affaire qui relève du pouvoir judiciaire mexicain et de la diplomatie française. Nous réaffirmons notre attachement aux relations scientifiques, culturelles et humaines avec des partenaires qui nous ont toujours accueilli avec respect, attention et amitié et dont beaucoup d'entre eux ont choisi de faire leurs études en France et de travailler ensuite avec nous.
Nous demandons au président de la République française de revenir sur sa décision de dédier l’Année du Mexique en France à Florence Cassez et réaffirmons notre amitié au Mexique. Danièle Dehouve, directeur de recherche CNRS, directeur d’études EPHE Marie-France Fauvet-Berthelot, Musée de l’Homme Alain Musset, directeur d’études EHESS Françoise Lestage, Professeur Université Paris-Diderot Marguerite Bey, IEDES-Université Paris I Claude Bataillon, CNRS Jean Rivelois, IRD Helios Figuerola, EREA Gregory Pereira, CNRS Olivia Kindl, El Colegio de San Luis, Mexique Joëlle Chassin, Professeur Université Paris III Julie Devineau, sociologue Anne-Marie Vié-Wohrer, Ecole du Louvre/EPHE Patrick Menget, directeur d’études EPHE Anne-Marie Losonczy, directeur d’études EPHE Marie-France Prévôt Schapira, Professeur Université Paris 8-Creda Anath Ariel de Vidas, CNRS-EHESS Gilles Bataillon, directeur d’études EHESS François Lartigue, CIESAS, Mexique Danielle Zaslavsky, El Colegio de Mexico, Mexique Marc Thouvenot, directeur de recherches CNRS Eliane Daphy, ethnologue, ingénieure CNRS Valentina Vapnarsky, directrice du Centre EREA-CNRS Karine Tinat, professeur chercheur, El Colegio de México, Mexique Michel Tibon-Cornillot, EHESS Irène Bellier, directrice du Laboratoire Anthropologie des Institutions et des Organisations Sociales-EHESS Claude Stresser-Péan, ethnologue Serge Gruzinski, directeur de recherches CNRS, Directeur d’Etudes EHESS David Robichaux, professeur, Universidad Iberoamericana, Mexique Brigitte Faugère, professeur, Université Paris I Philippe Macaire, anthropologue Martine Dauzier, professeur Université Paris Est Créteil Hélène Rivière d’Arc, CNRS Guilhem Olivier, UNAM-IIH, Mexique John Landaburu, directeur de recherches CNRS Charlotte Arnauld, directeur de recherches CNRS Bernard Vincent, directeur d’études EHESS Sophie Fisher, EHESS Patrice Melé, professeur Université de Tours Jean Meyer, CIDE, Mexique Claudia Cirelli, UMR CITERES-Université de Tours Chantal Cramaussel, El Colegio de Michoacán, Mexique Isabelle Rousseau, Professeur, El Colegio de México-CERI Sciences Po Paris Pascal Mongne, Cours Arts des Amériques, Ecole du Louvre Nadia Prévost Urkidi, Université du Havre Nicolas Ellison, EHESS, Toulouse Eric Taladoire, Professeur, Université Paris I Kali Argyriadis, IRD-CIESAS Mexique Maria Eugenia Cossio-Zavala, professeur, Université Paris III Annick Lempérière, Université Paris I
Anne Dastakian - Marianne
Photo : Florence Cassez - Capture d'écran - Dailymotion - europe.fr
http://www.marianne2.fr/Mexique-50-universitaires-interpellent-Sarkozy_a203123.html
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Laïcité : la gauche navigue à vue
24/02/2011 09:39
Pour le blogueur Romain Pigenel, Anne Sinclair, en rejetant sur son blog l'annonce par l'UMP d'un grand débat sur l'islam, illustre un des travers de la gauche : celui de répondre aux inquiétudes suscitées par l'islam et la coexistence républicaine des communautés en fustigeant la droite et l'extrême droite. Une attitude contre-productive qui empêche la gauche d'avoir une ligne claire sur ces thèmes.
On l’a bien compris : pour deviner la pensée et la parole « empêchées », comme on dit, de DSK, il faut désormais surveiller de près le blog d’Anne Sinclair. Très « écoutée » de son mari, chargée d’entretenir le désir, elle pourrait bien devenir le porte-parole le plus clairement identifié du directeur du FMI. Et comme pour répondre coup pour coup aux attaques de la droite contre celui-ci, elle a justement publié lundi une note fustigeant l’annonce par l’UMP d’un grand débat sur l’Islam dans la perspective de 2012. Un débat ? Des « petits et vieux manèges », dans la lignée de l’identité nationale, de la burqa et du discours de Grenoble, une « volonté d’agiter des peurs en espérant dégonfler l’extrême droite et ressouder [la] droite » ; « remuer encore une fois cette trouble marmite […] jouer avec le feu ». Il n’y a pas de problème lié à l’Islam en France, et ce qui « alarme » véritablement les Français, c’est « les inégalités inacceptables, le chômage omniprésent, l’école en déroute, la santé en panne, l’Europe toute entière en crise ».
« It’s the economy, stupid ! ». On connaît bien le discours repris en filigrane dans ce billet : les vrais problèmes sont économiques (« inégalités », « chômage »), sociaux (« école », « santé »), et le reste ne serait que calembredaines superficielles, voies sans issue pour la gauche et manipulations nauséabondes de la droite. Toute la nébuleuse complexe des questions religieuses, identitaires, culturelles devrait être reléguée aux débats télévisés du samedi soir, pour se consacrer au dur, à l’infrastructurel, aux valeurs socialistes, éducation, emploi, protection sociale. Une fois ce « gros œuvre » traité par l’État, à la société de s’organiser comme bon lui semble. Anne Sinclair mi-marxisante, mi-libérale « sociétale » ? Il est vrai que sa hiérarchie des préoccupations n’est pas absurde : elle reflète à peu de choses près, par exemple, le dernier sondage TNS Sofres, que le staff DSK a (on imagine) regardé de près. Le sujet que l’on pourrait le plus rapprocher du débat UMP sur l’Islam, « l’intégration et les relations entre groupes sociaux », n’y arrive que 15ème. Cela dit, on peut se demander en quelle mesure une formulation aussi contournée a été réellement comprise des sondés. Surtout quand on se remémore une autre étude IFOP récente, dont le résultat, aussi inquiétant que consternant, a finalement été fort peu commenté, peut-être justement parce qu’il dérangeait. Effectuée en Allemagne et en France, elle révélait dans les deux pays un rejet des Musulmans (et une conviction de leur non-intégration) transcendant les clivages politiques, et particulièrement saillant dans les catégories populaires. Ces deux études ne sont pas contradictoires : elles disent simplement, mises bout à bout, que même si la confession de son voisin n’est pas la principale obsession au jour le jour du citoyen français, elle peut devenir un sujet hautement problématique quand elle finit par arriver sur la table.
Or c’est précisément dans la nature de la question confessionnelle, comme des autres questions identitaires/culturelles/« sociétales », que de surgir dans le débat par à-coups, via un fait divers dont la portée émotive et symbolique dépasse de loin l’importance quantitative. Le port de signe religieux « ostentatoire », l’occupation d’une rue par des prières de groupe ou une tentative de baignade en burkini ne sont certes pas des événements du quotidien (hors contextes très particuliers) ; mais qu’ils viennent à passer devant les caméras des médias et alors ils prennent par contraste une importance d’autant plus forte, surtout qu’ils interrogent des principes fondamentaux (par définition, il n’y a de pas de petite entorse à un principe). Ce qui est vrai en temps normal se vérifie d’avantage encore dans les séquences d’hyper-attention que sont les campagnes présidentielles ; on se souvient, pour la problématique sécuritaire, l’ampleur qu’avaient eu et le rôle qu’avaient joué Papy Voise en 2002, et les émeutes de la gare du Nord en 2007. Si jamais un incident relatif à la pratique de l’Islam survient durant la campagne de 2012 – et il ne manquera pas d’y en avoir, provoqués s’il le faut, n’en doutons pas – il focalisera l’attention et aura valeur de test sur la fermeté et la justesse des principes, et des convictions, des différents candidats en lice. Malheur à celui ou celle qui étalera alors publiquement son désintérêt pour la question, ou sa confusion sur la réponse à apporter.
Puisqu’abcès il semble y avoir sur le sujet culturel et religieux de l’Islam, il faut le percer, et le plus tôt sera le mieux. Il ne suffit pas de se lamenter sur la désinformation ou l’immaturité du « peuple », de souligner que ceux qui critiquent nos concitoyens musulmans n’en ont peut-être aucun dans leur entourage, ou de tenter la méthode Coué et le catéchisme de masse sur l’air de « tout va très bien, madame la marquise ». Fustiger la droite ou l’extrême-droite sans se prononcer sur le fond, comme on l’a vu lors de l’épisode de la rue Myrha en décembre dernier, est une attitude éminemment contre-productive. La première chose à faire est de prendre au sérieux et de respecter les Français qui éprouvent un malaise, et de discuter de façon ouverte et non polémique de ce qui leur pose problème. On notera à ce sujet l’ambivalence du papier d’Anne Sinclair, à vrai dire classique des démonstrations de ce type : d’un côté, on évacue le sujet religieux, mais de l’autre on lui reconnaît bien tacitement une existence puisque l’on parle de « jouer avec le feu » ou de « remuer encore une fois cette trouble marmite ». Il faudrait savoir : soit les Français sont fous, malléables et stupides et la droite peut leur mettre ce qu’elle veut dans la tête en lançant les débats ad hoc ; soit il y a bien un ressentiment problématique qui prospère dans l’ombre, ce « feu » ou cette « trouble marmite », et alors il me semble qu’il est politiquement suicidaire et irresponsable de faire l’autruche à son égard.
A partir de là, que faire ? Prendre les devants, clarifier la position de la gauche et commencer à imposer son propre cadrage idéologique du débat, qui ne peut bien sûr être en négatif sur l’Islam, comme le propose Sarkozy, mais doit se faire en positif sur la réaffirmation et l’interprétation contemporaine de la laïcité. Jusqu’à présent, les polémiques médiatiques ont surtout démontré la division et le manque de ligne claire du PS et de la gauche : candidate voilée qui clive au sein du NPA, votes disparates sur l’interdiction de la burqa, maires socialistes protestant contre l’implantation de Quick halal sans prise de parole du national, Benoît Hamon reprenant maladroitement la condamnation de Marine Le Pen sur les prières de rue plusieurs jours après elle, des élus comme Manuel Valls ou Daniel Vaillant défendant plus ou moins franchement le financement (in)direct des lieux de culte… On navigue à vue. C’est l’impréparation plus qu’on ne sait quelle malédiction ou « trouble marmite », pour reprendre l’expression sinclairienne, qui fait de ces épisodes des chausse-trappe pour la gauche. Et ils le seront de plus en plus, à chaque nouvel incident, et à chaque fois que l’UMP ou le FN retourneront le couteau dans la plaie, si une clarification n’a pas lieu. Le PS doit donc utiliser le temps qui lui reste pour organiser une convention de travail sur la laïcité et les principes de la République – dans les textes des conventions organisées jusque là, le terme n’est apparu que deux fois (dans la synthèse sur l’égalité ), avec pour seule proposition de … mettre en place le service civique. On avance par ailleurs dans le même texte l’idée d’épurer les manuels scolaires des stéréotypes racistes. Chacun conviendra que c’est un peu court. Une convention permettrait de trancher les questions ouvertes et les interrogations factuelles (y a-t-il oui ou non assez de mosquées, par exemple ?) pour couper court aux fantasmes et aux approximations, de vérifier si la loi de 1905 permet encore de répondre à toutes les situations, de réfléchir à d’éventuels accommodements, de faire le bilan catastrophique du sarkozysme sur ce point, de souligner les contradictions de Marine Le Pen, et d’envoyer un signal fort au pays. Elle pourrait aussi être l’occasion de reposer calmement la question de l’identité nationale et de définir le fameux « vivre ensemble » socialiste, en interrogeant les concepts hautement problématiques de « diversité » et de « métissage », qui ne peuvent sérieusement être considérés comme un viatique suffisant pour répondre aux interrogations d’un pays doutant de lui-même et travaillé par des tensions ethniques et culturelles qui ne disent pas leur nom (Lagrange ou Guilly ont eu récemment le mérite de poser le débat sur ces sujets). Il s’agit ni plus ni moins que de repenser un projet national donnant une place à tous les citoyens de notre pays, sans les assigner à leur identité individuelle.
Que la droite s’empare la première d’un sujet ne devrait pas le marquer comme pestiféré et décourager la gauche de s’y attaquer, mais au contraire l’inciter à ne pas abandonner des terrains entiers du débat à ses adversaires. Nous avons chèrement payé ce genre d’erreur, dans le passé, au sujet de la sécurité. Assumer un débat permet de ne pas s’en laisser dicter les thèmes : Jean-Luc Mélenchon l’a apparemment bien compris ; et le PS ? Espérons que pour une fois DSK n’écoute pas sa compagne et ne s’enferme pas dans une myopie économico-centrée funeste pour sa famille politique.
Romain Pigenel - Blogueur associé Lire d'autres articles de Romain Pigenel sur son blog.
image : (capture d'écran Dailymotion - LePostfr - cc)
http://www.marianne2.fr/Laicite-la-gauche-navigue-a-vue_a203122.html
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La Gauche moderne, un parti qui a perdu sa raison d'être
24/02/2011 09:33
Bockel président ? Alors que la Gauche moderne envisage de présenter l'ancien Secrétaire d'État à la présidentielle, Elie Arié revient sur ce mini-parti de tendance social-libérale, membre de la majorité. Selon lui, Bockel, comme les autres ministres de l'ouverture, a confondu solidarité gouvernementale et beni-oui-ouisme. Or, avec son éviction du gouvernement, ses militants peuvent quitter le navire.
La « Gauche Moderne » annonce qu’elle envisage de présenter Jean-Marie Bockel à la présidentielle.
La « Gauche Moderne » est un mouvement créé lors de son entrée au gouvernement, après l’élection de Sarkozy, en tant que « ministre d’ouverture », par Jean-Marie Bockel, un des rares membres du PS affichant son soutien au blairisme (terme tabou chez les socialistes, même si DSK l’est au moins autant que lui, avec son concept de « socialisme de production » social-libéral, destiné à remplacer le classique « socialisme de distribution » social-démocrate, et à empêcher l’apparition de la pauvreté qu’il ne serait plus possible de compenser par des allocations de remplacement du revenu : mais il ne faut pas le dire !). Ce mouvement était destiné à rester distinct de l'UMP et à constituer l’aile « social-libérale » de la majorité présidentielle pour équilibrer les tendances trop droitières de l’UMP ; et, accessoirement, à servir de sas d’entrée à des militants déçus de la gauche et susceptibles de rejoindre le sarkozysme. Et le fait est que l’on est surpris de voir le nombre d’ancien militants du PS, mais surtout du MRC de Jean-Pierre Chevènement (dont l’ancien député Michel Suchod), qui y exercent des responsabilités - peut-être en souvenir des débuts en politique de Jean-Marie Bockel dans le très à gauche CERES de Chevènement ? Toujours est-il que ce recrutement donne une fâcheuse impression de gens ne s’embarrassant pas trop de revirement idéologiques parfois surprenants par leur rapidité... même si « seuls les imbéciles ne changent pas d’avis » : si c’est là le seul critère de l’imbécillité, il s’agit alors de gens supérieurement intelligents. Très vite, il a fallu déchanter de cette fonction de sas de recrutement de militants sarkozystes ; toujours restée micro-groupusculaire, la « Gauche Moderne » (appellation anachronique s’il en est, à moins qu’il ne s’agisse d’une antiphrase du type « parti radical ») est sans doute appelée à perdre ses derniers militants avec l’éviction de Jean-Marie Bockel du gouvernement : ceux qui ambitionnaient de faire une carrière politique devront aller chercher ailleurs - une fois de plus. Reste à analyser les raisons de l’éviction gouvernementale de Jean-Marie Bockel, qui semblait évidente à tous - et le principal intéressé, qui a déclaré, en l’apprenant « être tombé de l’armoire », doit bien être le seul à en avoir été surpris. Bockel a failli perdre son poste ministériel, une première fois, en 2008, lorsque, secrétaire d'État chargé de la Coopération et de la Francophonie, il avait annoncé que « la Françafrique, c’était fini » - revivant la même mésaventure qui avait mis fin, une trentaine d’années plus tôt, à la carrière d’un de ses prédécesseurs, Jean-Pierre Cot, sous la présidence de François Mitterrand, pour des propos identiques : la politique de la Françafrique est aussi constante que sa condamnation officielle. Cet acte fut la première et la dernière manifestation de « gauche » de « la Gauche Moderne » : depuis, celle-ci s’est caractérisée par le soutien inconditionnel et totalement langue de bois de la politique sarkozyste et de tous ses virages successifs, allant, parfois, jusqu’à déborder l’UMP sur sa droite avec sa proposition de « flat tax » (impôt sur le revenu à taux unique pour tous, quintessence de la pensée économique ultra-libérale) ; d’ailleurs, aujourd’hui, Bockel participe aux réunions des centristes : la « Gauche Moderne » ne peut se laisser déborder sur sa gauche par les centres ! Dès lors, la présence de Bockel au gouvernement, comme celle des autres « ministres d’ouverture », perdait toute raison d’être : ils ont confondu solidarité gouvernementale et béni-oui-ouisme, se gardant bien, à tout moment, de tenter de faire valoir leur sensibilité particulière, d’exprimer publiquement leur révolte contre leur impuissance organisée, au besoin en mettant en jeu leur démission, à une époque où cette menace aurait pu avoir un certain poids, car elle aurait mis trop tôt en évidence le mythe que constituait cette « ouverture ». Jean-Marie Bockel a ainsi découvert et démontré qu’un gouvernement n’a pas besoin de suivistes inconditionnels qui ne lui apportent rien (c’est là le rôle des militants), que la seule reconnaissance que pouvait lui valoir cet effacement volontaire était... son « remerciement » aujourd’hui acté, que la politique n’est qu’un rapport de forces dans lequel on n’existe plus si on renonce à user de la sienne ; en définitive, c’est son hantise de perdre son portefeuille sous-ministériel qui lui aura justement valu de le perdre : n’est pas Chevènement qui veut.
Elie Arié - Tribune
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La crise n'a pas remédié à la déconnexion des élites
24/02/2011 09:27
Dans sa chronique du 21 février 2011, Flore Vasseur estime que la crise de 2008, qui aurait du sonner le glas des dérives du système financier, a au contraire renforcé la déconnexion entre le peuple et ses élites qui sont au pouvoir.
Cette impression de déconnexion entre pouvoirs et réalité, entre une élite de plus en plus exsangue et ratatinée sur ses acquis et une société qui s’effondre sur elle-même devient douloureuse. Tout démarre vraiment en 2008. La finance fait son lit – de mort – avec les subprimes. La bulle éclate, la société trinque. Le Politique a la formidable opportunité de reconnecter l’économie à la réalité. En lieu et place d’un projet de véritable ampleur, ou même d’une remise en cause, on a un sauvetage des banques sur les deniers publics. Depuis, l’écart se creuse : le taux de chômage réel aux États-Unis dépasse les 22% selon shadowstats.com, un site qui démaquille les statistiques officielles. Le déficit extérieur américain augmente de 43%. Pourtant les marchés, Nasdaq en tête, renouent avec les records d’avant crise. Les liquidités injectées en masse par la FED, la Banque centrale Américaine, pour relancer l’économie n’auront servi qu’à acheter des biens à l’étranger et à doper les marchés. Ils se sont jetés sur cet afflux d’argent frais pour investir dans les produits spéculatifs : matières premières, valeurs technologiques. N’y a-t-il pas un dirigeant, une entité, pour dénoncer cette fuite en avant ? Cette déconnexion précisément avec la réalité ? Surtout pas ! Gardons nous surtout de les empêcher de prospérer tranquille en avançant quelques revendications. Les augmentations de salaires, c’est pour les traders ! Le CAC 40 explose, la finance se régale mais pour Jean-Claude Trichet, le patron de la Banque Centrale Européenne, ce serait une « grosse bêtise » ce sont ses mots, que d’augmenter les salaires des fonctionnaires. Entre nous, cela ne l’a pas empêché lui d’augmenter son salaire. Oyez, oyez pauvres pécheurs, faites ce que je dis pas ce que je fais ! Et regardez les bulles passer en silence. Va encore que nos dirigeants ne saisissent pas l’injustice de leurs politiques économiques. Ils peuvent prétexter que les marchés vont trop vite, que la mondialisation, ma bonne dame, c’est bien compliqué, que le capitalisme est une tyrannie, que les institutions bancaires sont trop puissantes. Tiens d’ailleurs, comme un fait exprès Barclays est entrain de changer de statut juridique pour éviter d’avoir à se soumettre à la loi Dodds-Franck sur la nouvelle régulation bancaire. Encore une qui n’est pas prête de se reconnecter à la réalité. Prospérons tranquille donc ! C’est ce qu’a dit aussi et entre autres l’un des fils Khadafi dimanche à la télévision pour calmer les protestants ivres de liberté : « Arrêtez, leur a-t-il dit, vous êtes en train de faire échouer un plan de 200 milliards d’investissement ». Comme en Égypte, il leur a coupé Internet. La déconnexion, mesure panique de gouvernements mal en point. Hillary Clinton en sait quelque chose : dans un étonnant numéro de claquettes toutes technocratiques, elle a dévoilé son plan pour défendre la liberté d’Internet dans les dictatures quelques jours après que le Sénat américain, son Sénat ait prolongé le Patriot Act qui précisément verrouille la liberté de l’internet aux États-Unis… .shadowstats.com
Mais la déconnexion la plus affligeante dans cette histoire, c’est la non réaction ou les réactions à contre temps de notre démocratie roupillante face aux soulèvements du Moyen Orient : silence radio au Quai d’Orsay alors que le régime libyen ordonne à son armée de tirer sur les manifestants et de brûler vifs les soldats qui refusent. Pourquoi ce silence ? Michèle Alliot-Marie subitement dépêchée au Brésil, on pourrait demander à Patrick Ollier, son mari, le Monsieur Libye du gouvernement. Coincé entre des contrats en panne, un baril de pétrole qui explose et des électeurs qu’ils espèrent atones, notre gouvernement se tait, espérant que le souffle révolutionnaire passera en les épargnant. C’est la Real Politik. Elle a rarement été glorieuse. L’internet l’a rendue plus crue. C’est que, de déconnexion en clivage, notre élite n’arrive plus à penser. Morte de trouille, elle fonce droit vers la rupture. C’est comme la bourse, une énorme fuite en avant. Un crash assuré. Heureusement, l’Elysée a son plan de com’ : Carla S. va chanter Trenet et susurrer Douce France en italien. Déconnexion donc….
Flore Vasseur - Blogueuse associée
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