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Créé le : 10/01/2011 15:32
Modifié : 09/08/2011 09:50

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Il faut rompre avec deux concepts-zombies : le libre échange et l’euro

29/03/2011 08:34

Il faut rompre avec deux concepts-zombies : le libre échange et l’euro


Publié sur Marianne2

MARIANNE2 Que vous inspire ce premier tour des élections cantonales ?

Emmanuel TODD Les observateurs ne semblent pas percevoir la poussée du Front national dans sa véritable dimension historique. Les commentaires se focalisent sur les transferts de voix entre l’UMP et le Front national, et nous devons constater la persistance dans les analyses produites, d’une thématique imposée de l’immigration de l’islam, de la sécurité, de l’identité nationale conçue en un sens étroit. Or, les résultats dont nous disposons témoignent plutôt d’une prédominance des déterminations socio-économiques dans les votes. Le Front national a franchi son plafond ancien du vote à 30% dans la classe ouvrière et s’approche de 40%. Deux signes confirment le caractère secondaire des thématiques identitaires (immigration, sécurité, etc.) : le score plus modeste (à 20%, ce qui n’est quand même pas mal) réalisé parmi les artisans et commerçants et la progression importante du Front national vers l’ouest, là où l’immigration demeure un phénomène insignifiant.

Vous décrivez un vote de crise…

La poussée du FN intervient après deux ans et demi d’une crise économique qui a appris à la population française et à d’autres populations dans le monde que leur classe dirigeante était incompétente. Ou totalement indifférente à leur sort. Les plans de « relance » ont abouti à quelques résultats merveilleux (sic), compréhensibles par tous : la relance du CAC 40, la baisse des salaires, l’accélération des délocalisations et l’aggravation du chômage de masse… Soyons sérieux : la grande nouveauté de la situation politique et idéologique est une radicale délégitimation des élites, phénomène qui autorise toutes les embardées politiques imaginables. Les Français sentent que la France est devenue un canard sans tête… L’ampleur générale du score frontiste et sa pénétration non insignifiante dans les classes « moyennes inférieures » et « moyennes moyennes », dans des cantons sans tradition industrielles et sans immigration, suggère l’idée que les gens n’ont plus confiance dans la gestion économique du pays. Même s’il survient des accidents dans l’histoire (pour moi, l’intervention en Libye, que j’approuve, en est une), un président tel que Nicolas Sarkozy incarne à merveille cette situation de vide. Mais ce vide n’est pas confiné à l’Elysée. Les classes dirigeantes au sens le plus large, incluant les responsables de l’UMP et les dirigeants sociaistes, ont été les défenseurs acharnés de deux options dont tout le monde sait aujourd’hui qu’elles sont obsolètes : le libre-échange et l’euro. J’utiliserais volontiers, pour décrire l’état de ces concepts, une expression du sociologue allemand Ulrich Beck, celle de « concept zombie » : un concept mort mais que l’on croit vivant. C’est très important. Les gens comprennent que le libre-échange détruit leur vie. Ils ont très bien compris depuis les crises budgétaires européennes que le système monétaire actuel est victime d’un acharnement thérapeutique. Les hommes de médias de ma génération ont aussi une responsabilité dans cette déroute des élites françaises. Quand je vois Jean-Michel Aphatie face à Marine Le Pen sur le plateau de Canal +, ou quand je lis Laurent Joffrin qualifiant de lepéniste « Ce soir ou Jamais », la meilleure émission de débat du paysage audiovisuel, menacée de surcroît par l’Elysée, il s’agit moins de journalistes que d’idéologues purs qui tentent de perpétuer une vision du monde totalement archaïque. Mais ils font partie des classes dirigeantes et particulièrement Laurent Joffrin dont les aller-retour entre le Nouvel Observateur et Libération, en tant que directeur, ont significativement contribué à la paralysie idéologique de deux grands journaux de gauche très importants et contribué à la non prise en compte par la gauche des intérêts économiques des milieux populaires.

Sauf que la plupart des responsables et des économistes affirment que l’abandon de l’euro se traduirait par une véritable catastrophe pour les populations européennes.


Certains économistes – pas tous heureusement – disent cela, mais les gens ne les croient plus et mes conversations privées avec certains membres de l’establishment me font soupçonner qu’eux-même n’y croient pas davantage. Mais il est extrêmement difficile de l’avouer parce que l’aveu, pensent-ils sans doute, produirait une délégitimation des classes dirigeantes. Or, le score du Front national nous indique que cette précaution devient superflue : s’ils avouent maintenant, mais sans trop tarder, ils seront pardonnés. J’ai été absolument fasciné, lors des commentaires post-électoraux, par le fait que Jean-François Copé et Christian Jacob ont rappelé que la nécessité de garder l’euro était le clivage premier qui les séparait du Front national. Au fond, la tendance sarkozyste de l’UMP suit pleinement le Front national sur les thématiques identitaires et de sécurité, ce qui rend la situation ingérable. La relance des thématiques identitaires a d’ailleurs été décidée à l’Elysée. Mais cette stratégie aboutit à mettre l’UMP dans une sorte de seringue : alors que le Front national peut aussi se déployer sur les thèmes économiques et sociaux en prônant la sortie de l’euro, la tendance sarkozyste de l’UMP qui représente au plus haut degré l’oligarchie économique, ne peut que défendre l’euro qui est l’argent des riches. Là réside sans doute la véritable explication des transferts de voix de l’UMP vers le Front national.

L’idée du Front républicain resurgie entre les deux tours vous paraît-elle utile, efficace ou au contraire contre-productive pour enrayer la poussée mariniste ?

Voilà bien un autre concept-zombie ! L’important n’est plus la tactique politique. Le Front national ne va pas prendre le pouvoir à l’occasion de ces élections cantonales, les électeurs sont libres. L’important est le renversement de l’hégémonie idéologique des concepts-zombies que sont le libre-échange et l’euro. L’UMP et le Parti socialiste, les dirigeants de grandes entreprises (ceux des PME ont compris) et les responsables des grands médias doivent être capables de penser en terme de protectionnisme économique, européen si possible. Ils doivent accepter l’idée que s’il y a un problème d’identité nationale pour la France, il réside dans sa relation à l’Allemagne et non dans ses rapports avec les Arabes. Les élites doivent accepter l’inévitabilité, si l’Allemagne refuse l’idée d’un protectionnisme européen, d’une sortie de l’euro. La réalité économique est que cette sortie poserait, certes, quelques problèmes techniques, mais ouvrirait mille possibilités de renouvellement et d’expérimentation, et des solutions originales aux problèmes posés par la dette publique, quoique peu agréables pour les détenteurs de capitaux.

On nous présente la sortie de l’euro comme une garantie absolue d’une baisse rapide du franc rétabli.

Mais c’est exactement l’effet recherché. Une dévaluation est toujours défavorable à ceux qui ont beaucoup d’argent, mais favorable, après ajustement, à la compétitivité économique des secteurs qui reposent sur un travail réel, à l’industrie, aux nouvelles technologies. D’ailleurs, honnêtement, plus j’y pense en tant que démographe plus je pense que la France, avec son taux de fécondité parfaitement satisfaisant, à deux enfants par femme, au milieu d’une Europe minée par des fécondités très basses, aurait intérêt à prendre quelque distance avec un continent menacé de sénilité. L’un des paradoxes fondamentaux du comportement du Front national dont rien ne nous garantit d’ailleurs qu’il aurait le courage de ses propositions économiques, est que l’analyse économique sérieuse conduit à constater que le protectionnisme et la dévaluation ramènent à la notion de solidarité nationale mais d’une solidarité nationale territoriale plus tôt qu’ethnique. L’une des implications paradoxales du programme frontiste est que la sortie de l’euro aurait pour effet pratique de contribuer à la réconciliation de toutes les classes sociales françaises et de Français de toutes origines. Les enfants d’immigrés seraient, autant que ceux des classes moyennes, les premiers bénéficiaires de la sortie de l’euro. Je reconnais que voir le FN en défenseur des enfants d’immigrés a quelque chose de surréaliste si l’on pense à l’ignoble proposition de préférence nationale qui fait partie du bagage idéologique du Front national. Symétriquement, des socialistes qui se battent contre la préférence nationale mais adhèrent à des politiques économiques qui détruisent en priorité les enfants d’immigrés ne sont pas des républicains sincères. En vérité, l’attachement des partis dits républicains à des concepts économiques qui détruisent la vie des Français pourrait faire bientôt du mot République un concept zombie. On peut toutefois ressusciter la République en changeant de politique économique.

Le plus spectaculaire et inquiétant dans le score de Marine Le Pen, est sa performance dans les catégories actives : selon l’iFOP, alors que l’électorat sarkozyste reste dominant parmi les catégories âgées, les intentions de vote de la tranches 34-49 ans est passée de 16 à 29% en un an ; parmi les 24-39 ans elle est passée de 20 à 25%.

Effectivement, ce contexte est tout à fait typique des situations de basculement idéologique. La fragmentation de la droite peut être perçue par des différences d’attitude entre sarkozystes fillonistes et marinistes. Mais au-delà de la confusion, ce sont les basculements générationnels qui importent. La fragilité initiale du sarkozysme était que le Président a été l’élu des vieux, très effrayés par les émeutes de 2005 dont il était largement responsable, et actuellement, la fuite hors de l’électorat UMP s’effectue dans ce qui restait de jeunes au sein de l’électorat de droite.

Votre diagnostic est à la fois convaincant et inquiétant. Que va-t-il se passer et qu’est ce qui est possible ? Comment en sortir ?

J’aimerais profiter de l’occasion pour définit mon attitude personnelle vis-à-vis de la crise que nous vivons. Je suis considéré comme un intellectuel critique radical du système. Mais je ne suis pas intéressé par les propositions irréalistes protestataires de la gauche de la gauche, et je ne crois pas une minute à la possibilité pour le Front national d’arriver au pouvoir en France. Je pense tout à fait que la France doit continuer à être gérée par une alternance entre les grands partis décents de la droite et de la gauche. Je ne suis pas partisan d’une destruction ou d’un rejet des élites. Je plaide simplement pour le retour des élites à la responsabilité et à la raison. Même si ça n’est pas enthousiasmant d’un point de vue utopique, je pense que le projet protectionniste européen ou la sortie de l’euro ne peuvent, dans le contexte français, être gérés que par des gens sortis des grandes écoles. Je demande simplement que la méritocratie française fasse son boulot, s’occupe de la démocratie française, et justifie ainsi ce qu’a coûté leur formation à la nation. J’admire la capacité du peuple français à résister à des élites devenues irresponsables – y compris malheureusement par un vote Front national - mais je ne crois pas à la possibilité d’une démocratie sans élites. La bonne démocratie fonctionne quand une partie importante des élites prend en charge les intérêts économiques et moraux de l’ensemble de la population.

http://www.debout-la-republique.fr/Il-faut-rompre-avec-deux-concepts.html






Insécurité, chômage, élections : Sarkozy restera-t-il candidat ?

28/03/2011 12:37

 Insécurité, chômage, élections : Sarkozy restera-t-il candidat ?


On se battait en Libye. Nicolas Sarkozy aurait aimé qu'on se félicite des progrès de la rébellion contre les forces du colonel Kadhafi. Mais ce week end, il pensait à autre chose. On votait en Sarkofrance, pour un scrutin cantonal méprisé. Ce fut un mauvais résultat de plus pour le Monarque. Un sujet d'inquiétude pour le candidat. Coûte que coûte, il faut oublier faire le bilan et même qu'il y avait des élections ce dimanche. A droite, on doute de lui. Dans le pays, on n'y croit plus depuis longtemps. Et ce ne sont pas les derniers bilans du chômage et de l'insécurité qui vont l'aider.


 
Insécurité, chômage, élections : Sarkozy restera-t-il candidat ?



Elections
Toute la semaine, l'UMP a douté. Nicolas Sarkozy a tenté d'imposer le ni FN/ni PS. Sa stratégie de rapprochement sémantique et politique vers l'extrême droite a démobilisé une belle partie du camp sarkozyste.

Le résultat définitif des élections cantonales fut sans surprise : il n'est pas fameux pour la « majorité » présidentielle. L'UMP a totalisé 19% des suffrages. Avec ce score, quelques centaines de députés UMP perdront leur siège l'an prochain. Il faudrait y ajouter les « divers droites » pour parvenir à un petit 30% coalisé. La gauche, rassemblée ou divisée, a attiré quelques 46%. Le Front national de Marine Le Pen environ 10% nationalement, mais près de 40% dans les 400 cantons (sur 1.500) où il était au second tour. L'abstention fut également importante, si importante qu'il est improbable de tirer de quelconques conclusions politiques sauf une : Sarkozy a démobilisé son camp. Sur les 19,9 millions d'inscrits, seuls 46% se sont déplacés. Quelques défaites furent symboliques : Isabelle Balkany, la grande conseillère de l'ombre, avec son mari, du Monarque, fut battue dans les Hauts-de-Seine à Levallois-Perret. Marine Le Pen triomphait : « L'espoir aujourd'hui c'est le Front national ! (...) C'est une révolution bleu-marine ! »

Les commentaires officiels furent éparses. François Fillon ne réagit que par communiqué, vers 20h15. La désertion. L'ineffable Jean-François avait du mal à cacher sa déception : « Dès demain, on repart à la conquête, ou à la reconquête, de celles et ceux qui ne sont pas allés voter ou sont sont allés voter pour le Front national. » et il ajoute, plus tard : « Nous avons reçu 5 sur 5 le message qu'ils nous ont adressé. » Son secrétaire adjoint Hervé Novelli concéda : « Il y a une forte interrogation aujourd'hui. » Rachida Dati fut à son habitude, incompréhensible et mauvaise perdante : « Pour l'UMP, c'est pas une victoire. Mais le Parti socialiste, c'est pas mieux. » Nanananèère !

Au final, il n'est pas sûr, bien au contraire, que Nicolas Sarkozy changera de stratégie. Mais il paraît évident qu'une fraction plus importante du corps UMP s'interrogera sur
sa compétence politique. « Ce serait une pure folie d'avoir un autre candidat que Nicolas Sarkozy ! », s'exclama François Baroin, l'ancien chiraquien et désormais porte-parole de la Sarkofrance vieillissante. L'inquiétude est donc là.

Il y avait d'autres bilans, moins glorieux et peu présents dans ce débat politique. 

Insécurité
Depuis 10 jours, Claude Guéant ne s'est pas épargné sur le front électoral, de petites phrases en grosses provocations aux relents frontistes. Il collait à la culotte, et sur ordre, la présidente Marine. Pourtant, il avait fort à faire sur son périmètre ministériel. En matière de lutte contre la délinquance, le ministre Guéant s'est bien gardé de commenter le bilan du mois de février, publié ce mois-ci par l’Observatoire national de délinquance et des réponses pénales (ONDRP). 

Sur 12 mois glissants (i.e. de mars 2010 à février 2011), les résultats sont mauvais. Sarkozy est un incompétent sécuritaire :

- Le nombre de vols est globalement stable (1,807 millions), mais les cambriolages ont progressé de 3,6% (à 320.000 au total), dont 15.000 supplémentaires contre les résidences principales. Les vols avec violences ont même explosé (+7,9%, soit 9.000 de plus en un an), pour atteindre 121.000 actes sur un an. cette progression provient pour l'essentiel des « vols violents sans arme contre des femmes sur voie publique ou autre lieu public. »

- Les destructions et dégradations de biens ont fortement baissé (-34 000 actes en un an), ce qui permet d'afficher une légère baisse des atteintes aux biens, au global. 

- Les atteintes à l'intégrité physique poursuivent leur progression... comme depuis 2002. 15 000 agressions supplémentaires sur un an, soit 469 000 faits à fin février. Plus précisément, la plus forte hausse vient des violences crapuleuses (+8 000).

Dans son bilan, l'ONDPR s'essaye, comme à chaque fois, à mesurer les affrontements entre bandes. C'était le grand cheval de bataille de Nicolas Sarkozy au printemps 2009, puis à nouveau l'été dernier, une vraie diversion pour masquer l'échec plus global d'une politique : « La deìfinition d’un "affrontement entre bandes" souffre de certaines imprécisions », rappelle l'ONDPR. Mais l'observatoire livre quelques chiffres : 33 affrontements relevés en février dernier, moins de 400 sur l'année. Le chiffre reste ridicule comparé aux près de 500 000 violences physiques enregistrées chaque année.


Chômage
Côté chômage, d'autres chiffres furent publiés, mais il était impossible de s'en servir. Xavier Bertrand, resta modeste. Le chômage avait « encore » baissé, mais d'un minable 0,1% de sans-emplois en moins en février... En fait, le ministre du Travail s'est caché. Pas de quoi pavoiser, même quelques jours avant une élection. Il n'est pas allé fanfaronner, la veille de l'annonce des résultats, comme il l'avait fait le mois dernier. On objectera que le mois de février est court, froid et peu comparable. Xavier Bertrand avait choisi d'attendre la publication des dernières statistiques du chômage pour les commenter. Il les trouva « encourageants ». Au total, le nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi toutes catégories s’établissait à 4,9 millions à fin février 2011, dont 2,9 millions sans aucun emploi. Formidable ! Le nombre de seniors au chômage a explosé : +13% sur un an, dont encore 1,4% supplémentaires en février. Il faudrait faire le lien avec l'envolée des ruptures de contrats de travail à l'amiable, qui concerne nombre de plus de 50 ans.


Dimanche soir, Nicolas Sarkozy se fichait bien de tous ses chiffres. Il pense toujours à 2012. Sa nouvelle feuille de route, pour l'instant, est déjà écrite. Faire peur à l'électorat, agiter les clivages, déplacer l'agenda politique le plus loin possible de son échec social et économique.
Juan Sarkofrance






PAS D'ACCORD !

28/03/2011 12:29

PAS D'ACCORD !


Nicolas Dupont-Aignan : "Il faut avoir le courage d'être pessimiste"

Le Figaro Magazine - DansL'Arnaque du siècle * que vous publiez, vous livrez une vision catastrophiste de l'avenir. N'y allez-vous pas un peu fort?

Nicolas Dupont-Aignan -Mais il faut avoir le courage d'être lucide, contre ceux qui nous bercent des promesses non tenues de l'euro. On nous avait promis la croissance, le plein emploi, une Europe sociale généreuse... Résultat : en dix ans, à force de délocalisations massives, la France a perdu 500 000 emplois industriels, nous avons un chômage de masse et nous assistons au détricotage de nos services publics. Pourtant, nous avons de nombreux atouts en main, mais la France d'aujourd'hui est dans une situation similaire à celle de l'entre-deux-guerres, sous Laval, étouffée par une monnaie trop chère.

Selon vous, les politiques actuelles nous mènent droit dans le mur?

La crise de l'euro est inéluctable parce que les plans de sauvetage qui ont été mis en œuvre ne traitent pas la cause des problèmes, à savoir une monnaie trop chère qui pénalise la production en France et dans les pays du Sud. Les dirigeants européens se sont contentés de sauver les banques en transférant le risque sur le dos des contribuables. Est-ce que les Français savent que les engagements qui ont été pris sur la Grèce et qui seront pris pour d'autres pays en difficulté vont leur coûter une fortune ? On a fait la réforme des retraites pour économiser 20 milliards d'euros et en une nuit le Parlement a donné 17 milliards d'euros à la Grèce, que les Français ne reverront jamais.

Mais sortir de l'euro, n'est-ce pas faire courir un risque encore plus grand à nos économies déjà fragilisées?

On cherche à faire peur aux Français en leur faisant croire qu'on ne peut pas sortir de l'euro. Mais aujourd'hui, on est train de tuer les différents pays d'Europe et l'idée d'Europe, pour sauver quelque chose qui ne marche pas et qui ne peut pas marcher. On ne peut pas avoir la même monnaie pour des économies différentes. L'euro, c'est une nouvelle religion qui ne profite qu'à une petite oligarchie. Pire, c'est une pure escroquerie. Dans mon livre, je détaille les mécanismes de cette arnaque. J'explique comment la dette nourrit les banques, comment l'euro est l'instrument d'un enrichissement d'une très petite minorité et d'un appauvrissement général de l'économie réelle. L'euro est la clé pour comprendre la perte de compétitivité de notre économie et la clé pour en sortir et redonner une bouffée d'air à notre économie. Les économistes et les politiques qui continuent de défendre l'euro me font penser à ces médecins qui défendaient le Mediator. Ce médicament que tout le monde savait dangereux mais que l'on a conservé pendant des années. L'euro, c'est la même chose.

C'est-à-dire?

Vous connaissez l'affaire du Mediator ? Vous allez adorer le scandale France Trésor. Cette agence dépend de Bercy. Elle a pour mission de gérer la dette et la trésorerie de l'Etat au mieux des intérêts du contribuable et dans les meilleures conditions. Auprès de France Trésor, il y a un comité stratégique. On pourrait imaginer que dans ce comité stratégique, il y ait des parlementaires, des capitaines d'industrie, des syndicalistes, pourquoi pas un banquier ? Curieusement, ce comité est le summum du conflit d'intérêt puisque ceux qui y figurent ne sont que des représentants de la banque internationale. Il est surréaliste que ceux qui conseillent la France pour le placement de leurs obligations d'Etat soient ceux qui y souscrivent. Le conflit d'intérêt est ahurissant. C'est ce petit monde qui profite en permanence de la dette. C'est eux que les plans de sauvetage au niveau européen vont sauver. J'ajoute que ce sont les mêmes qui se voient confier des missions d'études pour le placement des obligations des emprunts français. On est entré dans un cercle vicieux de surendettement de l'Etat : euro cher, croissance lente, déficits publics et sous-investissement dans l'avenir. Je rappelle qu'avant la loi de 1973, la Banque de France finançait le Trésor public pour les grands investissements et on ne payait pas d'intérêts. L'Etat, et donc le peuple, a abandonné son pouvoir monétaire à des banques privées.

Mais l'idée d'une sortie concertée de l'euro ne semble pas prendre corps chez nos partenaires européens?

N'oubliez pas que beaucoup d'entre eux n'ont pas l'euro et s'en portent d'autant mieux. Quant aux autres, cette idée va faire sens très vite parce que les peuples grec, portugais, espagnol et même français ne vont pas supporter plus longtemps le traitement de choc auquel ils sont soumis. Si les dirigeants européens n'ont pas la lucidité de choisir une autre politique pour relancer la croissance et donc pour satisfaire les besoins sociaux de leur peuple, ce seront les révolutions qui s'en chargeront. C'est une question de temps.

Par Raphaël Stainville

* L'Arnaque du siècle. L'euro, les banquiers et la mondialisation, Editions du Rocher, 160p., 13€. En librairie le 31mars.

http://www.lefigaro.fr/lefigaromagazine/2011/03/26/01006-20110326ARTFIG00596-pas-d-accord-nicolas-dupont-aignan-il-faut-avoir-le-courage-d-etre-pessimiste.php






Françoise Cachin, l’intransigeante

28/03/2011 12:18

Françoise Cachin, l’intransigeante


Elle n’était pas chef d’entreprise…

Le jour même où Françoise Cachin nous quittait, le « Livre blanc sur l’état des musées de France », rédigé par l’Association générale des conservateurs des collections publiques, qui réunit un millier de membres, était rendu public dans la presse. Il dénonce pour la première fois, à haute voix, ce qu’elle avait, dans les dernières années de son mandat, dénoncé seule, dans l’indifférence quasi générale de ses confrères, suscitant l’irritation de sa hiérarchie et très vite l’hostilité du ministère, jusqu’à ce qu’elle fût en effet remerciée du Conseil artistique des musées auquel elle appartenait de droit, et démise de la présidence de FRAME, l’association des musées franco-américains qu’elle avait cependant créée. Par la suite, elle n’a jamais cessé de batailler, toujours dans un silence embarrassé puis hostile, contre la dérive mercantile des musées qui les voit assimiler les œuvres patrimoniales qu’ils ont la charge de conserver, d’étudier et de faire connaître, à de simples marchandises que l’on peut vendre ou bien louer, comme s’il s’agissait de réserves naturelles de pétrole ou de champs de patates.

L’arrogance des nouveaux maîtres de la finance et de la communication

En écrivant ce texte, à la veille des obsèques de mon amie, je suis tombé, au hasard de Google, sur la fiche technique éditée par le ministère de la Culture décrivant la profession de conservateur de musée des collections publiques. Elle commence par ces lignes : « L’image ancienne et poussiéreuse du conservateur a volé en éclats : d’un rôle de responsable scientifique, le conservateur est devenu, avec la mutation du monde des musées, un gestionnaire, parfois un véritable chef d’entreprise. »

Quel mépris de la science et des scientifiques, ces personnages pittoresques et poussiéreux dont on aimerait se passer, mais aussi quelle arrogance des nouveaux maîtres de la finance et de la communication ! Et dans ce « véritable chef d’entreprise » tendu en modèle au futur conservateur, quelle triste ambition de remettre la direction des musées à des gens étrangers au monde de la culture, mais très proches en revanche de celui du business et des médias !

Désormais, dans les textes officiels encadrant les contrats entre musées, quand vous lirez le mot « prêter », comprenez « louer ». Hier, on prêtait, à titre gratuit par définition, dans un but éducatif et pour des expositions à caractère scientifique, des œuvres tirées des collections publiques. Aujourd’hui, on les loue, dans le cadre d’un échange commercial, pour des expositions bavardes et inutiles, parfois installées dans des lieux privés, dans le seul but de « générer des profits considérables qui vont de 1 à 3,5 millions d’euros par an », comme l’écrit ingénument, dans la novlangue du « véritable chef d’entreprise », qui a peu à voir avec celle de Focillon ou d’André Chastel, l’actuel directeur du musée Picasso1 dans un article publié deux jours après la mort de Françoise.

J’ai parfois entendu dire de Françoise Cachin qu’elle était une femme « dure », « autoritaire », « intransigeante ». Elle l’était, en effet. Elle ne pouvait que l’être dans l’exercice de ses fonctions. Première femme directeur des Musées de France, poste auquel elle fut nommée en 1994 par Jacques Toubon, elle venait de l’Université, pas du monde des affaires ni de la haute administration. Dans un milieu où on est peu sensible à la présence féminine et dont le courage n’est pas la qualité première, il lui fallait s’imposer comme femme et comme patronne. Elle s’est imposée, en durcissant des traits qu’au naturel elle avait des plus agréables et souriants.

Françoise aura été l’honneur de cette génération qui a fait des musées ce qu’ils sont devenus.

Elle n’était pas fonctionnaire à l’origine, mais avait été reçue, en 1966, au concours national de recrutement des conservateurs des collections publiques, créé l’année précédente. Elle rappelait souvent gaiement que nous l’avions passé ensemble, ainsi qu’avec Irène Bizot. En ces temps lointains, on craignait encore l’usage excessif de l’électricité pour éclairer les musées. Ensuite, nous avons longtemps roulé nos bosses, chacun sur nos chemins, avant de revenir secouer la poussière ensemble. Car poussière il y avait. Françoise Cachin aura été l’honneur de cette génération qui en trente ans, a fait des musées ce qu’ils sont devenus.

Dure à l’occasion, mais surtout courageuse. Le fonctionnaire est là pour tenir et maintenir quand les ministres passent. J’ai compté, pendant la quarantaine d’années que Françoise a consacrée aux musées, plus de trente ministres de la Culture, les pires et les meilleurs. Je me souviens d’un épisode très significatif. Le ministre d’alors nous avait réunis pour nous annoncer la dissolution du Comité d’acquisition des musées de France. Aussi ancien que les musées, ce Comité en était le symbole. Chaque mois nous étions une cinquantaine de conservateurs à nous réunir, de la France entière, petits et grands musées de tous les temps et de tous les espaces, du musée des Eyzies au musée Picasso et de Guimet au Louvre. Nous examinions les projets d’acquisition, qui étaient alors financés par la Réunion des musées nationaux : c’était la garantie du principe que nous croyions inaliénable, de la mutualité des musées : les petits sont nourris par les gros, puisque le patrimoine, national par essence, est celui de tous, qu’il s’agisse des trésors de la Grande Galerie ou de la petite collection de céramiques d’un lointain musée de région. C’était l’occasion, pour chacun d’entre nous, de se livrer à de grands morceaux d’éloquence et d’érudition pour convaincre ses confrères de la nécessité de tel ou tel achat, une formation permanente pour tous. Surtout, c’était une opportunité de se rencontrer, de se connaître –on avait assez peu l’occasion d’aller à Pau, ou même à Fontainebleau −, d’échanger, de prendre connaissance des problèmes et éventuellement de faire front ensemble. Et voilà que cette communauté allait disparaître. Chacun mourrait de son côté, seul, abandonné et sans le sou désormais, seuls les très grands musées étant assurés de grandir jusqu’à devenir des monstres d’autosuffisance.

Interdits, stupéfaits, nul d’entre nous n’osa répondre à ce ministre. Alors Françoise se leva, monta sur l’estrade et prit le micro. De sa voix tranquille mais indignée, elle souligna le désastre que cela serait ; elle avait vu clairement la manœuvre : c’était non seulement renoncer à la mutualité des musées, donc à l’unité et à l’indivisibilité du patrimoine, mais encore diviser le corps des conservateurs, le rendre impuissant et muet, de sorte à pouvoir, entre soi, entre « véritables chefs d’entreprise », préparer les mauvais coups, dont le contrat privé passé avec un émirat fut l’exemple le plus éclatant.

J’ai beaucoup admiré Françoise ce jour-là, malgré sa dureté souriante et inflexible, ou plutôt à cause d’elle.

Un autre épisode, autrement pénible, fut celui des MNR, les « Musées nationaux récupération », l’indication que portaient les œuvres d’art spoliées par les nazis et inventoriées par les musées. Françoise avait courageusement entrepris de rouvrir le débat et de régler le problème qu’on avait enterré depuis trop longtemps. Mal lui en prit. Elle fut l’objet d’insinuations et de lâchetés indignes, adressées qu’elles étaient à la petite-fille d’un militant communiste et d’un vieux peintre anarchiste – Marcel Cachin et Paul Signac.

Une autre nouvelle a été publiée dans la presse, deux jours après sa mort, qui l’aurait autant réjouie, je crois, que l’annonce de la parution du Livre blanc des conservateurs le jour de sa disparition : la nouvelle que, grâce au combat de quelques-uns, en particulier Pierre Nora, le ministère de la Marine ne serait sans doute pas transformé, comme cela avait été prévu, en un hôtel de luxe avec galeries marchandes2 .

Le ministère de la Marine, pour moi, c’est la gravure de Charles Meryon, où le monument est attaqué de profil par une escadrille d’oiseaux de proie griffus et monstrueux. Meryon, ce fut le graveur du Paris de Charles Baudelaire : le Pont au Change, la Morgue, le chevet de Notre-Dame de Paris, le Pont Neuf, c’est-à-dire le Paris même que Françoise a chéri, et au centre duquel elle vivait, dans l’île Saint-Louis, derrière l’Hôtel de Lauzun.

Elle avait, au début de sa carrière, écrit un bel essai, publié dans la collection des Lieux de mémoire de Pierre Nora sur le paysage français, des miniatures de Pol de Limbourg aux vues de la Seine de Bonnard et de Jean Fouquet à Corot. Analyse érudite et sensible, dont certains passages seraient sans doute aujourd’hui soumis à la censure puisque elle ose y parler d’un « sentiment d’identité nationale » « lié structurellement à l’art du paysage »3. Elle écrivait en conclusion que ces paysages peints qui survivent à l’art du peintre et nous aident aujourd’hui à revoir des lieux et des instants sont aussi des « memento mori implacables »4.

« Les impressionnistes à Paris » : une nouvelle image de la ville

Or, cet art du paysage, paysage rural, paysage mélancolique, paysage de la mort et de la vanité dont elle devait longtemps scruter les traits de la Bretagne à la Méditerranée, elle devait l’enrichir, à la fin de sa vie, par un autre art du paysage, cette fois de la ville, dans une magnifique exposition qui s’est tenue, non à Paris mais au musée Folkwang d’Essen, dans la Ruhr, Images d’une métropole : les Impressionnistes à Paris5.

Il s’agissait de plus, bien sûr, que des Impressionnistes : elle commence, là aussi, avec Corot, pour finir avec Matisse. Mais surtout, elle montre, mêlées aux maîtres, de Manet à Caillebotte, des œuvres peu connues, de Maximilien Luce à Devambez, d’Adler à Louis Anquetin, ou d’étrangers, de Menzel à Evenepoel, qui donnent de Paris une image bien éloignée de la vision traditionnelle de la « Ville-lumière ». Cette ville industrielle et pauvre, avec les cheminées d’usines, les fumées des locomotives et les gazomètres, avec les foules en fureur, les défilés, les émeutes ouvrières, me fait penser que le conflit qui l’avait opposée, lors de la conception du musée d’Orsay, à Madeleine Rebérioux, n’avait peut-être pas été aussi définitif qu’on l’avait dit6. La dureté ou l’intransigeance supposée de Françoise n’étaient pas aveuglement ni suffisance, mais plutôt réserve et réflexion en attendant la décision.

À mesure que le temps a coulé et que la politique culturelle en France s’est infléchie vers un ultra-libéralisme désastreux pour le patrimoine, elle n’aurait plus eu à choisir, peut-être, entre ses deux grands-pères, celui qui croyait au ciel de la réflexion politique et celui qu’elle chérissait, qui avait choisi la solution esthétique dans la lumière pure du ton décomposé. C’est, je crois, les deux, le politique et l’artiste, qu’elle aurait fini par appeler à l’aide.

Conservateur des musées de France, ancien directeur du musée Picasso, directeur de la Biennale de Venise du Centenaire, Jean Clair est l’auteur de très grandes expositions comme « Vienne, 1880-1938, naissance d’un siècle » (1986, Centre Georges-Pompidou, Paris), « L’Ame au corps, arts et sciences, 1793-1993 » (avec Jean-Pierre Changeux, Grand Palais, Paris, 1993), « Mélancolie : Génie et folie en Occident », (2005, Grand Palais, Paris), « Crime et châtiment », (avec Robert Badinter, 2010, musée d’Orsay, Paris). Il a également publié de très nombreux ouvrages, essais, pamphlets, journaux, dont certains ont suscité des polémiques féroces. Paraissent prochainement deux livres, L’Hiver de la culture, (Flammarion) et Dialogue avec les morts (Gallimard).

Jean Clair

  1. Anne Baldassari : « Nos expositions ne sont ni cyniques ni mercantiles », Le Monde, 8 février 2011
  2. « Le sort de l’Hôtel de la Marine », Le Monde, 8 février 2011
  3. « Le Paysage du peintre » in La Nation II, Gallimard, Les Lieux de mémoire, 1986 , p. 439
  4. Ibid, p. 463
  5. Bilder eine Metropole : Die Impressionisten in Paris, musée Folkwang , Essen , octobre 2010 – janvier 2011
  6. Jean-François Revel a parfaitement résumé cet épisode en évoquant la « politique culturelle » inventée par les socialistes en 1981 : « L’ère de la culture comme pédagogie commence (…). L’art sera rendu à sa fonction qui est d’illustrer l’histoire du mouvement ouvrier. Par exemple, le ministre de la Culture, Jack Lang, a dépêché une historienne des mouvements sociaux auprès des historiens d’art qui se consacraient impunément depuis trois années à l’installation du futur musée d’Orsay où sera exposée la peinture française du XIXe et du début du XXe siècles. La mission de cette personne est de faire rayonner sur les conservateurs des musées nationaux une surveillance sanctifiante pour les empêcher de céder à la tentation picturale. » La Grâce de l’Etat, Grasset, 1981, pages 157-158

http://www.causeur.fr/francoise-cachin-l%e2%80%99intransigeante,9335






Pour faire réellement face au Front national

28/03/2011 11:11

Pour faire réellement face au Front national


Une tribune de Julien Landfried, secrétaire national du Mouvement Républicain et Citoyen, parue sur Rue89, dimanche 27 mars 2011.
L'espace politique que Marine Le Pen semble conquérir témoigne d'une radicalisation du monde du travail face à la globalisation financière, l'euro et le libre-échange. Une gauche regardant le monde tel qu'il est devrait y répondre politiquement. Cela implique de rompre avec l'état d'apesanteur dans lequel elle s'est enfermée.


Pour faire réellement face au Front national
 
Il aura fallu attendre les analyse stimulantes de Christopher Caldwell parues sur Rue89 et dans le Weekly Standard et celle d'Emmanuel Todd sur Marianne2.fr pour sortir du débat convenu qui entoure la montée du Front national.

Le journaliste américain et l'intellectuel français se rejoignent pour décrire la percée de Marine Le Pen comme une réponse populaire à la décomposition des élites (« la dérive du pouvoir » pour Caldwell, une « classe dirigeante incompétente » pour Todd). Celles-ci se révèlent incapables d'assurer un niveau de protection suffisant à un monde du travail broyé par la globalisation financière et le libre-échange.

Pire, elles semblent s'enfoncer dans un déni surréaliste : sur l'euro (qui nous « protégerait »), le libre-échange (qui nous spécialiserait sur l'« innovation »), l'immigration (aux effets nécessairement bons). Les souffrances des classes populaires et des classes moyennes sont euphémisées : on parle de « sentiment » de déclassement ou d'insécurité pour ne pas avoir à leur apporter une réponse politique.

La zone euro, machine à accélérer les divergences
Commençons par l'euro. Depuis son instauration, non seulement la désindustrialisation de l'économie française s'est poursuivie, mais elle s'est accélérée. La zone euro, loin de faire converger ses économies, fonctionne en réalité comme une machine à accélérer les divergences. Le seul mécanisme d'ajustement qui demeure est celui de la baisse des salaires et des niveaux de vie (salariat allemand, et désormais grec, portugais, espagnols, etc.).

Le « pacte de compétitivité » conclu entre Mme Merkel et M. Sarkozy est de ce point de vue la dernière erreur en date des élites politiques françaises : mentalité de rentier, privilégiant les possédants sur le salariat et les entrepreneurs. Est-il besoin de le préciser ? Ce « pacte » n'améliorera en rien la compétitivité de l'économie française qui souffre avant tout d'un taux de change de l'euro trop élevé au regard de sa spécialisation.

Soit la France discute fermement avec le gouvernement allemand (peut-être plus accommodant après 2013) pour réorienter l'euro (euro faible, statuts de la Banque centrale européenne réformés dans le sens de l'emploi, restructuration d'une partie des dettes publiques). Soit, si le dialogue s'avérait impossible et les différences de projection entre les deux voisins trop grandes (on pense en particulier à la démographie), il faudrait que la France reprenne sa liberté monétaire et pour tout dire, reprenne ses affaires en main, avec les responsabilités que cela implique (en particulier quant à la compétitivité de son économie et aux niveaux de ses déficits).

Le monde du travail sent bien que sans base industrielle solide, le financement de la protection sociale et des retraites fait défaut. Et ce n'est pas l'incantation à une « Europe sociale » ou à un « smic européen », propositions surréalistes dans le contexte politique européen actuel, qui peuvent ramener les couches populaires vers un vote plus raisonnable. L'« irreal politik » européenne (pour reprendre l'expression d'Hubert Védrine) n'est pas une politique.

Face au libre-échange, reconquérir un appareil industriel
Le libre-échange, ensuite. L'idée que, dans le libre-échange actuel, l'Amérique du Nord et l'Europe se spécialiseraient sur l'innovation tandis que l'Asie serait l'atelier du monde, ne résiste pas à l'analyse. L'Asie sera demain la plus grande concentration de chercheurs et de techniciens de l'histoire : elle sera à la fois le premier centre de production et le premier centre de recherche. Il est donc aberrant de continuer à fonctionner en système parfaitement ouvert avec des économies, elles, ouvertement protectionnistes (le cas de la Chine est bien entendu emblématique).

La gauche doit donc comprendre que la défense du monde du travail passe d'abord par une stratégie de défense du tissu industriel (en particulier des PME sacrifiées par les grands groupes), puis par une reconquête d'un appareil industriel digne de ce nom.

A cet égard, toutes les mesures favorisant l'industrie nationale sur la compétition étrangère doivent être mobilisées, sans à priori : on pense à la TVA sociale, mais aussi à des mesures permettant au capitalisme familial (qui fait la force de l'Allemagne) de prospérer. Mais rappelons-le, aucune issue n'existe sans un taux de change moins élevé pour nos produits (euro réformé ou plan B, comme évoqué précédemment).

Pour faire face au Front national, qui n'a évidemment pas les moyens de répondre à la crise du capitalisme mondialisé, les élites françaises, et singulièrement les élites de gauche, doivent abandonner certaines vieilles lunes (Todd parle de « concepts-zombies ») et accepter de protéger à nouveau les gens ordinaires. Telle est la véritable stratégie qui permettra non de se donner bonne conscience, mais de renouer avec un peuple, qui demeure, en dernière analyse, le souverain en démocratie.

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source :
Rue89
 





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